Unanimement la qualité de ce Dardenne a été reconnue, unanimement la performance de Cotillard remarquée, unanimement le palmarès de Cannes a surpris par l'absence totale de "Deux jours, une nuit" et unanimement la justification a été apportée sur les multiples récompenses déjà reçues par les frères Dardenne. Sans juger le choix du jury ni renier la prestation de Julianne Moore, Marion Cotillard n'aurait tout de même pas démérité le prix d'interprétation.
Cette actrice est un mystère incroyable. Après "De rouille et d'os" elle continue de faire oublier son égarement hollywoodien, exclu "The Immigrant" où elle avait réussi sa traversée de l'Atlantique. Ici elle porte le film par son naturel poignant qui donne toute l'authenticité que sollicite le propos. Cette histoire est extrêmement commune et c'est ce qui la rend émouvante. La sobriété dans l'écriture et le jeu entretien l'authenticité des personnages et leur mésaventure, leurs choix et réactions diverses reflète aussi une grande part d'universel saisissante.
En parti par sa protagoniste principale toujours compréhensive face aux refus qu'elle essuie, "Deux jours, une nuit" évite le piège de trop appuyer son propos en l'uniformisant. Le scénario intègre pleinement le rejet, l'incompréhension et l'incapacité que suscite naturellement une telle demande. Évidemment cette objectivité n'empêche pas le film d'être bien intentionné.
Ce parcours de vie qu'il raconte est admirable dans la combativité qu'il défend et l'optimisme qu'il dégage. Sandra est emportée dans un fleuve d'émotions, elle suit d'abord le courant et tente de rester à la surface. Elle butte sur les obstacles en premier lieu, puis à force de soutiens Sandra les contourne et les combat même. Cette fragilité doublée d'une affection débordante sont admirablement retranscris par l’interprétation de Marion Cotillard. Cela atteint son paroxysme lorsque dans la même scène elle nous fait ressentir son extrême désespoir poussé presque au bout du drame puis dans l'instant suivant une réjouissance immense face à l'arrivée d'un miracle inattendu. Ce passage très précis est crédible malgré l'ascenseur émotionnel osé mais il est aussi très intéressant dans ce qu'il raconte. La conclusion de l'affaire est juste dans le détachement de Sandra et la dispense d'une happy-end un peu factice. Cet entre-deux est bien plus éloquent dans le message d’espoir qu'une résolution simpliste du problème.
Ce récit donne une belle leçon de vie et ne tombe jamais dans le tragique pathos. La combativité de Sandra et ses proches, son mari surtout, est ravissante et certains moments de vie son simples et beaux avec des relations sincères.