Derrière le swing, l'horreur...

DJANGO (13,3) (Étienne Comar, FRA, 2017, 115min) :


Faux Biopic sur Django Reinhardt, guitare héros du jazz manouche, mais plutôt un double portrait à la fois de l’artiste qui ne manquait pas de swing mais de vision politique et portrait émouvant sur le sort de la communauté tsigane lors de la Deuxième Guerre Mondiale entre 1943-45. Pour son premier long métrage Étienne Comar prend ce parti pris audacieux d’évoquer juste un pan de la vie de ce guitariste génial à la vitesse d’exécution qui affolait le tout Paris occupé. Un musicien très apprécié des allemands qui souhaitaient le recruter pour d’immenses concerts à Berlin histoire de distraire ses soldats avant qu’ils repartent sur le front. Un artiste ordinaire loin des tourments de la Guerre concentré sur sa musique, un homme piégé qui subit les conséquences du conflit et assez passif aussi envers les femmes qui l’entourent (maman, femme et maîtresse).


La mise en scène de facture classique n’arrive malheureusement par à la hauteur de l’ambition du film. Malgré de nombreuses scènes musicales où l’on voit toute la dextérité de Django dans son jeu de guitare particulier à deux doigts (dû à un accident de feu), le récit manque de rythme et certains passages comme l’incarnation de Django Reinhardt pour quitter la France s’avèrent laborieux. Alors que la menace gronde avec le génocide qui s’intensifie, la narration linéaire convenue n’élève pas la mise en image illustrative. Ce film très musical à la reconstitution appliquée manque d’émotions plus viscérales tout au long de l’intrigue alors que la guerre fait rage. Il faut attendre l’épisode où les allemands mettent le feu au camp de manouche et le final avec son bouleversant hommage au « Requiem pour mes frères tsiganes » (dont les partitions sont quasiment toutes perdues), transformé pour l’occasion par Warren Ellis en « Lacrimosa song » pour que ce requiem s’empare de notre âme pour nous donner de vrais frissons émouvants. Dommage car ce projet élégant trouve en la personne de Reda Kateb une incarnation assez enthousiasmante de cet homme lumineux, secret, attachant et porté par la grâce de sa musique admirable, et dont l’acteur impressionne la pellicule avec justesse !


Malgré ces défauts, l’évocation de cet artiste singulier les conséquences sur le funeste sort des tsiganes à la fin de la guerre par les nazis est à saluer, alors que certains ces temps derniers ont tendance à oublier l’horrible destin quand le fascisme décide de prendre le pouvoir…Venez découvrir ce génie rattrapé par l’Histoire dans « Django ». Attachant, scolaire et mélancolique.

seb2046
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le 29 avr. 2017

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