Spike Lee, comme je l'ai déjà dit, est un cinéaste que je connais trop peu, de même que Paul Thomas Anderson ou Alfred Hitchcock. Cependant , après d'avoir vu "La 25ème Heure" et "Inside Man", j'ai décidé de m'attaquer à ses chefs d’œuvres. N'ayant pu trouvé "Malcom X" , j'ai décidé de voir "Do the Right Thing". Histoire attrayante et John Turturro en rôle secondaire, je me suis donc lancé dans les nuits chaudes de Bedford Stuyvesant.
Nous suivons ici Mookie, livreur de pizza pour Salvatore Fragione, pizzaïolo italo-américain. Il y a également Pino, fils raciste de Sal, son petit frère Vito, un peu simplet mais sympathique, Buggin' out, noir légèrement trop réactionnaire, Radio Raheem,noir toujours avec sa radio, Jade, petite amie de Mookie, Smiley, noir mentalement déficient vendant des photos de Martin Luther King et Malcom X, Le Maire, vieil homme noir amoureux de Mother-Sister, la mère de Mookie, un groupe d'amis noirs sans travail et un couple d'épiciers coréens. Tout ce beau monde vivant à Bedford Stuyvesant, la journée rythmée par la voix de la radio, Mister Señor Love Daddy, jusqu'au jour où la chaleur échauffe les esprits
. Véritable appel anti-raciste, ce film est une pure merveille, quelque soit les points. D'abord, l'ambiance. Une musique absolument géniale, des décors superbes et des seconds rôles criants de vérité. Si ils peuvent sembler caricaturaux, moi je n'y vois que des jeunes s'amusant à à se moquer ou à attiser de petit conflit, je sais de quoi je parle j'en côtoie tout les jours. Le casting, composé de peu de stars, touche beaucoup par sa justesse, même si je dois avouer qu je trouve comme meilleur acteur du film Danny Aiello qui joue Sal. Vient ensuite les deux points qui font passer ce film d'excellent à exceptionnel: son scénario et sa mise en scène. Rarement un film sur un éventail aussi vaste sur des personnages aussi simples ne m'a autant touché. Cette communauté vivant si paisiblement, avec leurs caractères et préjugés, sombrant peu à peu dans une folie nerveuse et paranoïaque m'a énormément touché, et on ne peut que les plaindre de vivre dans un environnement aussi hospitalier et pourtant si hostile, les montants les uns contre les autres. Si proches et pourtant et pourtant si haineux. La puissance de l'histoire est de partir d'une bagatelle pour qu'un agitateur fasse monter le quartier contre un de ses habitués. Ce monde si coloré et joyeux cache en fait une colère latente n'attendant qu'une étincelle pour déclencher l'explosion. Tout cela sous la caméra de celui que je considère désormais comme un génie, Spike Lee. La mise en scène est d'un symbolique puissant et génial. Que ce soit la caméra de plus en plus penchée signifiant la chute de la communauté, ou les plans subjectifs pour recevoir des leçons des personnages. Et surtout, une séquence ressemblant étonnement au monologue "Fuck You" d'Edward Norton dans "La 25ème Heure" ou l'introduction de Clive Owen dans "Inside Man" m'a marqué à jamais. Tous les personnages nous disant à nous, spectateurs, leurs préjugés sur tous les autres personnages. Pour chacun d'entre eux, contre-plongée, entiers dans le cadre, puis travelling pour finir en gros plans sur leurs visages. Sans compter le nombre de références au cinéma glissées par Spike Lee, que ce soit les portraits de Robert DeNiro et Al Pacino sur le Wall of Fame de Sal ou les poings américains marqués des mots Love et Hate de Radio Raheem rappelant les phalanges de Robert Mitchung dans "La Nuit du Chasseur"
En bref, ce film est une merveille brillamment interprétée et magistralement réalisée. Personnellement rarement un film ne m'a touché aussi facilement, directement et subtilement. A recommander chaudement à toute personne aimant les films à messages forts.