J'ai toujours mal au coeur quand je vois quelqu'un vanter les mérites cinématographiques de Jean Claude Van Damme. Outre son investissement prétendument superbe pour ses films, revient souvent l'idée que le cinéma hong-kongais et les spectateurs du monde lui doivent énormément; ce serait en effet grâce à lui que l'occident connaîtrait de grands réalisateurs de films d'action chinois, qu'il aurait envoyés, par pur esprit de passionné, sur le devant de la scène.


En pleine période de cocaïnomanie, on se dira plutôt qu'il avait besoin d'apporter du neuf à sa carrière, de se refaire un nom à l'orée de la fin de l'âge d'or des films d'action aux acteurs charismatiques. Si ses potes Steven Seagal et Chuck Norris ne s'en relèveront jamais (encore qu'ils ne s'étaient pas trop élevés non plus), Van Damme aura au moins eu le mérite d'essayer avec une première collaboration internationale, le Chasse à l'homme de John Woo, pour enchaîner sur le Risque Maximum de Ringo Lam, et ce Double Team, drôle d'essai d'un Tsui Hark qui continue d'expérimenter malgré la catastrophe qu'annonçait l'entreprise.


S'il y avait une erreur à ne pas faire, c'était bien d'ajouter un comic-releef à Van Damme; déjà suffisamment ridicule, il assurait le spectacle, rires garantis. On se retrouve quand même avec un Dennis Rodman, basketteur à ses heures insupportables en tant qu'acteur, auquel on aura calé un rôle de drag queen caricatural pour amener, semble-t-il, un peu plus de légèreté à l'ensemble qui devient, involontairement, un ramassis de vannes merdiques, de scènes ridicules instaurant un épais malaise inévitable.


C'est même triste de voir un basketteur être finalement si mauvais acteur, et l'observer échouer dans un rôle désastreux par tous ses points d'existence. L'associer aux expressions de visage de Van Damme a tout d'hypnotisant; on est à la limite de l'abrutissement de masse alors que les vannes pleuvent comme les mauvaises punchlines pré-écrites, et que les mêmes clichés tombent toujours sur les mêmes minorités, sans jamais être intéressant en tant qu'objet politiquement incorrect.


Double Team développe juste un mauvais goût constant des plus répugnants, sans jamais se poser pour réfléchir, développer un thème ou deux en particulier, se rendre un peu moins navrant que ce qu'il peut afficher. Alors il y aura bien la mise en scène de Tsui Hark pour rattraper la débâcle de l'ensemble (notamment du scénario, insensé et bordélique), encore qu'elle tente trop de choses sans savoir se canaliser sur les bons délires visuels auxquels s'accrocher.


Elle essaie d'innover, aussi, dans la manière de montrer les combats; ralentis forcés en images de synthèse, explosions multiples en début de 3D révulsante, avec esthétique kitsch mais originale qui laisse interrogateur à l'observation. On ressent quand même la maîtrise du genre de Tsui Hark, qui multiplie les excès jusqu'à ce drôle d'affrontement où Van Damme fait face à un homme qui se sert de ses pieds pour le menacer d'un couteau. Ça a le mérite d'être original.


Il faudra rester jusqu'à la fin pour assister à cette scène hallucinée en pleine arène de Rome, où des croix représentent des emplacements de mines, où Mickey Rourke, en pose The Wrestler, jouera les pro d'arts martiaux par les joies des doublures et du montage (un montage malin mais qui s'égare parfois) tandis qu'il lancera, aux trousses de Van Damme, un fantastique tigre tantôt naturel tantôt en images de synthèse, qui terminera maltraité par un Jean Claude national n'ayant peur de rien, mais aura, pour la peine, quand même droit à un petit repas avant de filer en beauté style 14 juillet.


Complètement incohérent, de mauvais goût (suivre Van Damme qui multiplie les déguisements comme Bond les Vodka-Martini a quelque chose d'incroyable), cette première collaboration de Tsui Hark et du cascadeur belge se foire en tous points, même si l'on pourra la considérer comme un excellent nanar. Loin du niveau d'un Woo à Hollywood (les conditions de tournage n'ayant surement pas été les mêmes, vu le succès public de ses autres films chez les ricains), Hark livrait un film de commande sur lequel il semblait tout de même s'amuser, encore qu'on aura du mal à prendre son travail au sérieux quand il expérimente les ralentis et autres explosions numériques.


Rendu laid par ses problèmes de technique, son côté délire complotiste/science-fiction/terrorisme avec une introduction digne d'un Last Action Hero, en bordélique et mal montée, Double Team n'est rien d'autre qu'un petit nanar a conseiller aux fans de mauvais films, de Van Damme ou de Tsui Hark.


En espérant que Piège à Hong Kong sera meilleur.

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le 9 juil. 2019

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FloBerne

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