Superstition médiévale vue de Tchécoslovaquie

Drôle de plongée dans le cinéma tchécoslovaque de la fin des années 60, à travers cette vision hallucinée de la superstition sous la forme d'un conte à l'époque médiévale. De par sa trame narrative éclatée, de par ses expérimentations esthétiques et sonores, "The Return of Dragon" ne se laisse pas facilement saisir. L'expérience est très originale, mais elle peut s'avérer déroutante et laisser hermétique.


Lorsque celui que les villageois surnomment Dragon revient visiblement après plusieurs années d'absence, un vent de panique souffle sur les environs. La rumeur se répand, la peur emplit les chaumières : "Dark days are coming!" Dragon serait à l'origine de nombreux maux, sécheresses et autres maladies, que tous n'ont jamais vraiment oubliés. La figure de Dragon, avec sa grosse balafre et son œil en moins, n'inspire pas vraiment confiance. Enfermé dans un étrange mutisme et retranché derrière ses traits durs, il faudra attendre les premiers flashbacks pour avoir une image plus nuancée de sa personne et pour comprendre la raison de son retour éponyme.


Au centre de "The Return of Dragon", un portrait ambivalent en deux temps. D'un côté l'ancien potier amoureux de sa femme, dépeint à travers des fragments de flashbacks, injustement frappé par la tragédie de l’opprobre populaire qui l'avait accusé d'être à l'origine des maux du village. De l'autre, un vagabond sur le retour, menaçant au moins en apparence, qui a perdu sa femme et sa maison, et prisonnier des superstitions ayant alors cours. "Drak sa vracia" se transforme alors en un vague essai expérimental sur l'impossible retour à la normale en dépit de ses efforts répétés. Cette partie-là du film n'est clairement pas la plus convaincante, les révélations issues des flashbacks n'étant pas d'une redoutable efficacité et n'invitant qu'à une nouvelle interprétation des faits mineure. Il faut par exemple se tourner du côté de l'habillage sonore pour trouver un matériau intéressant : très peu de dialogues, une musique minimaliste, et lors de nombreux passages angoissants, des murmures inquiétants participant à la propagation de la rumeur. Seulement quelques frissons à se mettre sous la dent.


[AB #204]

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le 26 févr. 2017

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Morrinson

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