Je croyais ne pas l'avoir revu depuis vingt ans. Et puis, j'ai fait le calcul: 2017 - 1984, ça fait 33 ans. Autant dire, une claque.
J'ai donc revu Dune au cinéma, en copie argentique, pas du tout remasterisée, et même.. en VF. Le comble du kitsch. Mais l'important était de le revoir comme je l'avais découvert.
Et comment dire? Sans doute que, oui, le film a des qualités. D'ailleurs, je me souvenais de certaines scènes, ou de quelques images. Quoique, en fait, pas beaucoup.
Le problème, là, 33 ans après, c'est que j'ai surtout perçu les défauts. Passons sur les effets spéciaux, qui ont forcément vieilli, ce qui n'est pas grave. Mais comment se fait-il que je n'avais pas perçu la première fois les défauts atroces de la chose? Je n'en mentionnerai que quatre, les plus graves à mes yeux:
- comment se fait-il que Sting et Paul Smith jouent comme des savates? Non seulement ils n'ont qu'une seule expression tout le long du film, mais elle est naze. On dirait le "sourire sardonique" sorti d'un nuancier de portraits pour autistes.
- d'ailleurs, tous les Harkonnen sont ridicules, pas au sens où les politiciens actuels sont ridicules, non, mais au sens où le réalisateur n'a pas su leur donner la moindre dimension crédible, ni même supportable.
- pourquoi Lynch a-t-il bloqué sur l'aspect "mystique" de l'histoire, en laissant en plan.. tous les autres aspects, ou peu s'en faut ?
- enfin, pourquoi, mais pourquoi les doubleurs français ont-ils adopté ce ton compassé pour faire s'exprimer leurs personnages ? Notamment les nobles, qui causent tellement avec le petit doigt en l'air qu'on dirait des Envahisseurs. "Viens z'avec nous, Paul !" On voudrait nous faire croire que Dune, c'est les "Liaisons dangereuses" du XXe siècle qu'on ne s'y prendrait pas autrement.
Non, décidément, ça n'est pas passé, ça ne passe plus. S'il est vrai que la qualité d'une oeuvre artistique est dans la nuance de ses tons, alors le ton de Dune est celui d'une tragédie de boulevard dont on a échangé le public avec celui du théâtre burlesque d'en face. Il n'y a que le régisseur qui soit au courant, et il se marre tout seul en coulisse depuis 33 ans. Ce qui ne me gênerait pas outre mesure, si je n'avais cette impression ineffaçable que David Lynch se foutait carrément de la gueule du public de SF en faisant ça. J'affirme que Lynch n'a rien compris à Dune. Comme pas mal de gens, vous me direz. Mais justement, on attend toujours celui qui comprendra. (Non, ce ne sera pas l'individu Jodorowsky.) Et plus j'y pense, plus je me dis que ça devrait être une femme.