Good Time et Dunkerque ont célébré les noces entre film d'auteur et méga production hollywoodienne pour fêter joyeusement une idée commune : l'ivresse du mouvement.
Nolan - dont toute la carrière est traversée de morceaux de bravoures, souvent sclérosés par un cinéma cerveau pseudo intelligent qui annihilait injustement sa puissance esthétique et son désir de lâcher prise en joli concept démiurgique un peu lourdaud- abandonne ici l'intellect pour embrasser la promesse de sensation inhérente à son cinéma.
Et quel prodige de cinéma que ce film de guerre ! Dans les airs, sur terre ou sur mer, c'est un véritable ballet opératique qu'orchestre ici fièrement Nolan, créant à partir d'un embryon d'action -un soldat anglais qui tente de s'échapper des balles allemandes- un macrocosme de suspens et de tension, allègrement aidé par la bande son toujours trépidante du brave Hans Zimmer.
Tout dans le film est question d'échelle et de solidarité humaine entre les différents corps défendants, reliés par un montage alterné toujours inventif et ingénieux, accumulant et juxtaposant des bulles de tension pour ensuite laisser déferler l'ouragan d'action accumulé, où l'émotion est toujours jointe à l'héroïsme.
C'est une entreprise inter-humaine que filme Nolan où l'aboutissement du récit nous amène à la conjonction des temporalités, à la parfaite cadence des mouvements et des actions de chacun jusqu'à ce que la multitude se transforme en force commune, jusqu'à ce que les hommes deviennent Humanité.
Un avion qui tente d'atterrir sur une dune de sable, un équipage essayant de s'extirper du naufrage d'un bateau: autant de gestes qui remplacent et se superposent aux longs discours historiques et explicatifs pour redonner toute la puissance émotive au désir de survie et à la construction de cette entreprise humaine.
Pour reprendre l'envers d'un diction célèbre du vieux Gandalf: courez-y pauvres fous !