Tout d’abord emballé par les partis pris du film, son montage déstructuré, le choix de ne jamais montrer l’ennemi, de ne pas montrer une seule goute de sang (sauf sur le crane d’un enfant), sa musique « couche de basse » qui donne l’impression de nager dans un cauchemar un peu abstrait.
Le film est d’ailleurs truffé d’indices étranges, quasiment autant sujets à sur-analyse que la toupie d’Inception. Comme ce double plan énigmatique qui nous montre une plage avant et après un bombardement, le 2ème dénué de cadavres …
A la moitié du film, j’ai pensé que Nolan avait pris la bataille comme prétexte pour nous livrer son véritable film sur les limbes, qui se teminerait certainement en ruban de Möbius ou par un autre de ces « prestiges temporels » qu’il affectionne.
Ce qui aurait permis de condenser les obsession de l’auteur, et d’apporter un véritable point de vue original sur l’enfer de la guerre, tout en excusant les approximations historiques d’un film qui aurait été avant tout un rêve éveillé.
Mais des les premières secondes, et ses panneaux de textes « historiques » placés là pour rassurer le spectateur alors que le simple flyer allemand placé au début du film faisait très bien le job à lui tout seul, on avait aussi le signal que le projet de mise en scene du bonhomme allait devoir faire quelques concessions pour débloquer le budget qui lui permettrait de jouer avec ses gros jouets.
Mais je ne pensais pas que les concessions (au studio ? a lui même ?) iraient jusqu’à un final de type « retour au bercail » à la limite du film de propagande, travelling avant vers le visage de Tom Hardy sur une voix off de Churchill qui nous explique que perdre, c’est pas cool, mais être vivant c’est pas mal.
La grande oeuvre mystique se transforme alors en entreprise mielleuse à peine digne d’une cinématique de Battlefield, et pire, n’assumant pas son trip, fait revoir ses partis pris à la baisse.Le jeu sur la temporalité ne sert donc à rien dans le récit. Le manque de sang perd sa valeur mystérieuse pour ne devenir qu’une concession de plus au grand public.
Reste, comme toujours chez Nolan, des images magnifiques, des partis pris techniques intéressant, de véritables grandes scenes, ainsi qu’un effort dans la lisibilité de l’action de la part d'un mec dont ça a souvent été le défaut(même si un ou deux acteurs sans cheveux noirs auraient aidé à se repérer sur qui est qui …).
En bref, un son et lumière souvent impressionnant, mais aussi d’une profonde vacuité.

ThomasLesourd
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le 25 juil. 2017

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Thomas Lesourd

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