Spectrum Films continue l’exploration de la filmographie du très peu prolifique Alex Law, à peine cinq films entre 1988 et 2014 (il fera bien plus ses armes en tant que scénariste de films tels que An Autumn’s Tale, Eight Taels of Gold ou encore The Soong Sisters). Après avoir sorti le très intéressant Painted Faces (1988), son premier film, ils récidivent avec son avant dernier à l’heure où j’écris ces lignes, Echoes of the Rainbow (2010), une bobine que le China Daily avait placée sur sa liste des dix meilleurs films chinois de 2010. Semi-autobiographie, Echoes of the Rainbow peut même se targuer d’être le premier film hongkongais à avoir remporté l’Ours de Cristal au Festival du film de Berlin, en 2010. Auréolé de bien d’autres récompenses, il a même été choisi pour représenter Hong Kong aux Oscars de 2010. Ne laissons pas plus durer le suspense, oui, Echoes of the Rainbow est un bon film, et même un très bon film. Mais il est surtout un beau film qui porte un regard nostalgique sur le Hong Kong des années 60.


Produit par Mabel Cheung (Eight Taels of Gold, The Soong Sisters), Echoes of the Rainbow nous raconte son histoire à travers les yeux naïfs d’un garçon de huit ans, un procédé pas forcément original puisque déjà vu plusieurs fois mais qui va s’avérer ici extrêmement efficace tout le long du film. Nous sommes ici dans une tranche de vie dans laquelle on va suivre une famille : le petit garçon un peu espiègle, qui rêve de devenir astronaute ; son grand frère, son modèle, médaillé sportif, qui plait à tout le monde ; ses parents, qui font en sorte de leur apporter un cadre de vie le plus correct possible malgré des revenus très limités, à une époque où Hong Kong devient chaotique et où les gens commencent à quitter le pays. Les premiers amours, les premières déceptions, les aléas de la vie qui viennent tout compliquer, la maladie qui fait voir la vie autrement, la corruption des services publics qui n’aide pas, … On y découvre une jeunesse heureuse, avec un frère qui (comme pour beaucoup de gens) est à la fois le pire ennemi et le meilleur ami, avec des parents stricts mais aimants. Mais aussi des moments plus compliqués, comme dans toutes les familles. La narration de Echoes of the Rainbow est impeccable et jamais on ne sent le temps long malgré les quasi deux heures du film. On pourrait lui reprocher certains évènements un peu précipités, un peu trop rapides, ou de verser au bout d’un moment un peu trop dans le sentimentalisme. Mais malgré le côté tragique de l’histoire, le réalisateur Alew Law cherche à garder un ton positif et son film partage avec le public des leçons de vie des plus sincères. La mise en scène de Law est précise, avec une superbe photographie aux couleurs volontairement un peu ternes, aux contrastes appuyés faisant ressortir le vert et le rouge. La reconstitution des années 60 est très crédible et certains plans d’ensemble sont tout bonnement magnifiques. Sans doute que le travail des plus minutieux d’Alex Law touchera bien plus les spectateurs hongkongais, mais ça marche malgré tout sur tout le monde car l’histoire qui nous est racontée est universelle. La famille, l’école, l’amour, la fraternité, le travail, la mort, c’est la vraie vie.


Echoes of the Rainbow va aborder divers sujets, plus ou moins en détails. Mais il va surtout nous présenter une succession de moments heureux et de moments difficiles qui vont nous embarquer avec eux grâce au travail effectué sur les personnages et le talent des acteurs qui les interprètent. Alex Law fait un travail fantastique pour capturer l’innocence de l’enfance grâce à un tout jeune Buzz Chung bluffant de naturel pour son jeune âge. Sandra Ng, pourtant parfois complètement insupportable dans des rôles comiques, est ici absolument géniale et très juste dans un rôle plus sérieux. Elle joue la mère de famille, très forte en apparence avec son bagout qui lui permet d’embrouiller quiconque, mais pourtant si fragile. Simon Yam est très crédible en père de famille et on sent une réelle complicité dans le duo. Les scènes où ils sont seuls et échangent tous les deux nous offrent des moments très profonds. Pour son premier film, Aarif Lee (Cold War, Kung Fu Yoga) s’en sort très bien, avec un rôle pas facile dans lequel il doit faire passer plein d‘émotions. De manière générale, c’est tout le casting qui s’en sort avec les honneurs et tous les personnages sont attachants, des premiers aux seconds rôles. Les interactions entre eux sont toujours justes et s’ils retiennent autant l’attention, c’est parce qu’ils semblent réels et crédibles. Ils sont à l’origine de très belles scènes, avec de beaux moments de fraternité, des moments nostalgiques parfois chaleureux, parfois difficiles, qu’Alex Law nous conte avec une grande sincérité. Bien entendu, ce passé dont il nous parle est sans doute romancé, peut-être pour mieux souligner les difficultés de cette époque et pour mettre en lumière la corruption ambiante qui régnait à Hong Kong. Les scènes les plus fortes ne sont d’ailleurs pas les plus larmoyantes, mais des moments tout simples. Une scène où le mari fabrique des chaussures à sa femme et qui lui explique pourquoi il les a étudiées ainsi, une autre où les deux remettent en état leur boutique après le passage d’un typhon, sont quelque part plus émouvantes et plus accrocheuses que d’autres plus tristes. Car elles sont simples mais font passer plein de choses, comme le film en lui-même qui, accompagné d’une excellente bande son, nous parle, nous interroge, nous fait passer par plein d’émotions.


Echoes of the Rainbow est un film tout simple sur la vie d’une famille vivant dans un quartier pauvre de Hong Kong dans les années 60. C’est surtout un très beau film magnifiquement interprété et mis en scène. Merci Spectrum Films.


Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-echoes-of-the-rainbow-de-alex-law-2010/

cherycok
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le 29 mai 2023

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