Ode à l'adolescence et second amendement

Elephant est traumatisant. L'histoire de lycéens lambda et de leur journée, une froide journée d'octobre banale. Parallèlement à cela, deux jeunes, deux souffre-douleurs, se préparent à accomplir une fusillade, comme deux enfants se prépareraient à jouer à la guerre. Le système du film choral, des plans séquence, des croisements et des épisodes qui se rejoignent, qui m'a fait penser au Pulp Fiction de Tarantino, permet de montrer que le déroulement des épisodes est totalement banal dans une vie de lycéen. Le couple, les trois jeunes filles et leurs discussions insipides, Michelle au CDI, Elie qui prend des photos, tous ceux-là, innocents vont voir leurs vies se terminer dans un immense jeu de rôle. On ne peut pas voir Elephant sans être bouleversé. Bouleversé par ces scènes de tuerie, de massacre, ensanglantées et cruelles. Bouleversé par ces sons, ces balles, semblables à un tonnerre. Bouleversé par cette musique, ce Für Elise de Beethoven, joué par un ado, comme le calme avant la tempête, la beauté d'un morceau classique avant le sang qui coule, les rires des deux tueurs, les cris des élèves. Van Sant, dans sa trilogie de la mort, signe ici son chef d'oeuvre : on retrouve ces longs plans filmés de dos, caméra à l'épaule, ces dialogues peu présents, cette musique entêtante. Elephant décrypte une journée noire des Etats-Unis, de la jeunesse, du monde, avec une lassitude significative de l'adolescence, qui fait bien évidemment penser à l'oeuvre de Larry Clark toute entière.

CFournier
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le 24 mai 2016

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Coline Fournier

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