En matière de vérité, les faits sont souvent têtus

Ce film, sorti en 2010, de Gilles Paquet-Brenner est l'adaptation d'un roman éponyme de Tatiana de Rosnay qui fut l'année précédente un succès planétaire de librairie … Roman que je n'ai d'ailleurs pas lu et dont il me sera difficile d'en parler en termes d'adaptation.

Ce film n'est pas qu'un film sur la rafle du Vel' d'hiv mais plutôt sur ses effets collatéraux. La rafle en est le point de départ et concernera une petite fille juive, Sarah, qui, contrairement à ses parents, parviendra à s'en échapper ce qui ne l'empêchera pas d'en être traumatisée à vie.

En fait, l'histoire ressurgit du passé grâce à la ténacité d'une journaliste chargée de faire un papier sur la rafle. Elle en vient à s'intéresser à l'appartement dans le quartier du Marais où la famille de son mari s'est installée les jours qui suivirent la rafle… Elle découvre alors l'existence de Sarah et mène l'enquête pour savoir ce qu'elle est devenue.

Il y a ainsi plusieurs aspects dans ce film qui se passe à différentes époques pendant la guerre (la rafle et le pillage des biens des juifs) et de nos jours (vers 2010).

Disons-le tout de suite, l'histoire de Sarah est tout-à-fait passionnante et permet de mesurer à quel point un traumatisme violent vécu pendant l'enfance peut être dévastateur sur le développement de la personnalité. Surtout si l'enfant a une part de responsabilité, même involontaire, dans l'évènement traumatisant.

Spoiler : à ce titre, le symbole de la clé du placard dont Sarah ne sépare jamais est d'une très grande force.

Dans cette partie du film, il n'y a pas tellement de pathos sinon, simplement celui lié aux scènes de violence durant la rafle puis au Vel' d'hiv où le cinéaste ne fait pas dans la dentelle mais n'est pas non plus dans l'excès. Ce qui me semble normal et plutôt convaincant quand on veut relater une ignominie comme cette rafle de familles entières, organisée et assumée par l'Etat français.

Là, où les choses m'ont paru nettement moins intéressantes, c'est "l'habillage" du personnage de la journaliste avec ses problèmes conjugaux et intimes (elle est enceinte, envisage d'avorter puis non) qui ont tendance à polluer le film et, à mon sens, à en amoindrir le message.

D'un point de vue distribution, le rôle de la journaliste est tenu par Kristin Scott Thomas avec une certaine efficacité (avec les petits bémols scénaristiques évoqués ci-dessus).

Par ailleurs, l'actrice, Mélusine Mayance, qui joue le rôle de Sarah jeune est impressionnant de dynamisme et de présence à l'écran. Je pense qu'elle vole un peu la vedette à Kristin Scott Thomas.

On peut trouver dommage que les rôles des "parents adoptifs" de Sarah joués par Niels Arestrup et Dominique Frot (à ne pas confondre avec Catherine) sont un peu trop schématiques.

De ce film, je retiens surtout l'importance des effets collatéraux de cette guerre. Les dégâts humains des nazis ne s'arrêtent pas à leurs assassinats méthodiques et en nombre dans les camps de concentration. Mais, le sujet des secrets de famille bien cachés par exemple concernant l'acquisition des biens confisqués à l'occasion de la rafle vaut aussi son pesant de cacahouètes …

JeanG55
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le 18 juil. 2023

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JeanG55

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