Alors, on danse ?

En corps est le nouveau film de Cédric Klapisch. Cette fois-ci, le réalisateur français nous emmène dans le monde du ballet et de la danse contemporaine. Et on remarque que la danse jalonne le cinéma de ce metteur en scène. Déjà, dans l'Auberge espagnole, la danse était l'enjeu d'une scène de séduction mémorable à Barcelone. Dans son avant dernier film, Deux moi, le cours de danse était le lieu de LA rencontre. Ici, la danse est tout. La danse est la vie, la mort, la joie, la tristesse.

On suit ici les aventures d'Elise, danseuse de ballet de son état. Dans la scène d'ouverture, brillante, où elle doit danser la Bayadère, la caméra la suit dans les coulisses avant d'entrer sur scène. Les jeux d'ombres et d'éclairage narrent autant la scène que les mots. Les gestes en disent également beaucoup. Elle voit son amoureux, puis voit ce qu'elle ne devait pas voir, à savoir qu'elle est trompée et subitement la lumière devient rouge. Mais il est déjà temps de monter sur scène et de se blesser.

Le temps pour Elise (magnifique Marion Barbeau, danseuse de l'opéra de Paris) de se réinventer. Il est vrai que la danse est un des meilleurs moyens d'expression non verbale qui existe. Comment alors s'exprimer pour cette jeune femme qui s'est dédiée à la danse depuis son enfance ? C'est tout l'intérêt de son parcours. Entre diverses rencontres, avec notamment une ancienne danseuse qui a du se réinventer, son compagnon cuisinier itinérant, son père avocat un peu à l'ouest, les danseurs contemporains de la compagnie de Hofesh Shechter et enfin, la gérante d'une chambre d'hôte spécialisée dans la résidence d'artistes (Touchante Muriel Robin).

Le corps parle, mais les mots font aussi leur effet en révélant des maux plus profonds. Maux du corps endolori mais aussi mots de l'esprit. Les frustrations, les espoirs, les amours, les craintes. Mais dans ce monde, résolument positif et joyeux, Klapisch dépeint une jeunesse avide de vivre, qui a envie. De danser, d'expérimenter, d'aimer. Ainsi, même s'il ne s'agit pas d'une comédie, le ton est souvent à l'humour. Un humour subtile, intelligent. 

Encore une fois, Cédric Klapisch réussit à faire de son cinéma de la belle poésie, avec l'aide notamment de la musique de Bach, vieux compagnon de route.. Par sa manière aussi de filmer les corps et la danse. Par sa façon également de collecter les émotions de ses personnages, et par la même occasion, de les provoquer chez le spectateur. En corps, encore, alors, on danse ?