Enclave
6.6
Enclave

Film de Goran Radovanović (2015)

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L'enclave arrive comme une bonne surprise car en ces temps où tous les regards se tournent vers la Syrie, je m'interrogeais sur le cas du Kosovo, dont on ne parle plus beaucoup. Situation complexe au niveau culturel que le conflit a considérablement chamboulé, on était en droit d'attendre un portrait cru de la situation façon The search, en espérant cette fois ci être immergé au coeur de la population civile. Le personnage principal étant ici aussi un enfant, il y avait donc de quoi frapper fort. Le film décide toutefois d'éviter de prendre part dans le conflit. Il préfère en filmer les conséquences, quitte à se perdre dans une histoire individuelle.


C'est le problème de ces petits films étrangers qui, parce qu'ils sont tournés dans des conditions difficiles ou dans un contexte troublé, arrivent dans notre cinéma occidental avec la promesse tacite de nous parler de ces vrais problèmes, ceux qui laissent mécontentement et rancoeur dans le coeur des gens ayant subis les conflits (auxquels nos démocraties contribuent régulièrement en choisissant des camps). Or cette promesse est rarement tenue. Et c'est assez logiquement que le film s'inscrit complètement dans cette catégorie, et dont l'amateur d'enjeux sociaux devra se contenter des miettes. Cela ne rend pas le film mauvais en soit. L'implication et la performance assez naturelle des acteurs, enfants comme adultes, est à la hauteur. Toutefois, le film donne davantage l'impression de survoler le drame de cet après guerre au goût amer, où le calme imposé semble prêt à laisser place aux coups d'un feu simplement étouffé. Le film pose des conflits religieux, traditionnels, ethniques (la tension entre les enfants serbes et albanais, tout comme cet enfant albanais précipité dans un monde d'adulte par la mort de son père pendant le conflit). Mais ce sont de simples faits, qui ne donneront jamais l'impression d'un ressenti global de la situation. De même, le rôle des militaires de l'ONU, assurant la sécurité des serbes exclusivement, reste ambigu et effacé, non développé. Les autorités locales font quant à elles preuve d'une serbophobie intimidante sans toutefois outrepasser le rôle de policier. Cela et les édifices portant les traces des bombardements seront les principales choses qui illustrent le contexte, on n'ira pas chercher plus loin.


Le film tente alors de s'étoffer avec le père ayant participé secrètement au conflit et surtout son films, qui sympathise avec une bande d'enfants albanais guidé par Bashkhim, le jeune berger déjà mentionné plus haut. Il y a là une petite volonté de créer un rapprochement par le coeur, malgré le passé et les tensions encore vivaces. L'intention est belle, et le parcours cohérent d'ailleurs, toutefois, c'est un symbole qui reste très individuel, et qui ne parle clairement pas à une échelle nationale de solidarité. L'enclave se contente donc de ses petits personnages et d'illustrer un drame certes touchant, mais qui ne cherchera pas à parler du conflit autrement que par un minimalisme bien maigre. Reste une belle petite histoire et un travail honnête.

Voracinéphile
5
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le 28 avr. 2016

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