La trop importante filmographie de Vadim, essentiellement constituée de demi-navets, dont le succès tenait pour beaucoup à la provocation et au sexe, n'est pas là pour plaider la cause de ce film.
Néanmoins il me semble que "Et Dieu créa la femme" n'est pas son pire opus, sans être non plus son meilleur.
"Les liaisons dangereuses" avec Moreau et Philipe, tourné en 1959 est certainement d'une plus haute tenue, du moins de mon point de vue.
Pour en revenir au film avec Bardot, il faut dire que son jeu d'actrice peut agacer: un phrasé artificiel, une palette d'expressions assez minimaliste , qu'elle ne réussira à sublimer que dans "la vérité", sous la férule de Clouzot.
Ici on part du postulat que son jeu n'est pas le plus important; ce qui compte, c'est quelle ait "le cul qui chante", comme le dit spirituellement le chauffeur du bus, dans l'une des premières scènes du film.
On a peine à se figurer la puissance érotique de BB au moment de la sortie du film, et malheureusement, c'est cet élément primordial qui fera son succès, et qui incitera Vadim à avoir recours à la même recette dans quasiment toute sa production ultérieure. Hélas pour lui, il en va de l'érotisme comme de la prise des stupéfiants: pour que cela continue à faire effet, il faut constamment augmenter les doses, souvent au détriment de l'intérêt scénaristique. Vadim finira quasiment par tourner des sous-pornos dans les années 70.
L'héroïne du film a de minces ambitions: qu'on lui foute la paix, et qu'elle puisse s'adonner sans entraves à son hédonisme. Autour d'elle, une brochette de mâles en rut tente de l'accaparer. Parmi eux on trouve Trintignant, le pale mari qu'elle accepte de prendre, pour se faire émanciper, Jurgens, qui joue le magnat de l’immobilier "pété de fric", Christian Marquand, le frère de Trintignant, un bellâtre qui chipe éhontément la femme du frérot...
La morale de l'affaire? Il n'y en a pas. Chacun suit ses pauvres ambitions financières ou sexuelles, le tout dépeint avec un certain cynisme par Vadim.
Selon qu'on soit réaliste ou idéaliste, on appréciera ce tableau avec plus ou moins d’acquiescement.