Partons au bout du monde, en pleine période introspective, Monseur Kitano nous sortait Takeshis', jolie collection de ses gimmicks, de ses personnages et de sujets identifiables à 1.000 lieues.
Ete 85, c'est un peu le Takeshis' de François Ozon, on retrouve dans ce film absolument tous les éléments récurrents de ses œuvres passées :
- Un drame personnel et intime dans une ambiance estivale et colorée, au bord de la mer
- La mort est au cœur du le film
- Des pères absent physiquement et psychiquement
- La figure compensatrice de l'absence du père est forcément le prof de littérature.
- Des mères de familles victimes totales de leur compagnon, fussent ils justement absents, mais leur rôle se révèle essentiel.
- Une femme en élément perturbateur
- Le héros se déplace en vélo, avec une robe bleue (plusieurs fois !!!).
- Il y a un léger parfum de scandale, de la "provoc" Ozon si on veut, celle là même qui ne fait plus hurler les critiques depuis la fin des 90's, mais à laquelle le réalisateur reste abonné, sans surenchère depuis les glorieuses années de son éclosion sulfurisée.
- Le kitsh est parfois très présent, dès le début du film avec l'arrivée d'un personnage en sauveur sous de lourds nuages noirs. Mention spéciale aux 5 minutes de plans consécutifs enchaînant motos, musique 80's et couchers de couchers de soleil aux couleurs improbables (je me suis cru coincé devant l'écran des scores de ce bon vieil outrun, sur une borne d'arcade de l'époque).
Le film pourtant dépasse cet impression d'autopromotion des obsessions de son réalisateur, et une fois qu'on a fini de s'attarder sur les clichés et les clins d’œils volontaires, il reste un beau petit film, que certains qualifieront de mineur, mais sans doute parfait pour un mois d'août 2020 tellement spécial ...
Si la trame peut sembler légère, le ton alterne entre lui les passages d'ombres et de lumière, tel le ciel normand. Tout cela pouvant sembler inutilement complexifié par des flashbacks qui tuent directement le suspens pour mieux s'attarder sur de belles images. On rentre pourtant facilement dans cette histoire d'amour de vacances. Le jeu des jeunes acteurs y est pour beaucoup. Rayonnants, touchants, jouisseurs et exhaltés sans voir le précipice sous leurs pieds, ils incarnent parfaitement ce premier, trop fort, et nécessairement fatal, amour.
Le film sait aussi amener ses moments de finesse. Quand il s'agit de montrer l'isolement dans lequel rentre un des protagonistes totalement dévoué à son amour naissant, on opposera ainsi, aux scènes des retrouvailles brutales avec son ami du début du film, ou aux choix d'orientation pris sous l'emprise des sentiments, la jolie scène de la "bulle" en discothèque qui dit la même chose avec plus de finesse (en réussissant le tour de force de nous donner envie de se lover sur du Rod Steward).
En bref, j'ai aimé et je recommande, sans surprise étant parfaitement Ozon-compatible. Ceux qui voudront regarder le film de haut trouveront tous les arguments rationnels pour cela, mais peut-être ce film n'était-il pas pour eux.