Extinction
2.6
Extinction

Film DTV (direct-to-video) de Adam Spinks (2014)

Graou, graou.
Oh, Roger ! T’as entendu ça ?
Non ! De quoi tu parles ?
Bah ! J’ai dû rêver, ça doit encore être Gérard qui fait le malin. Gérard, salaud !
Graou, graou.
Eh ! T’as entendu, là ?
Ouais !
Je suis sûr que c’est un jaguar !
Mais… On est en pleine forêt amazonienne ?
Qu’est-ce qu… Aaaargh.
Graou.


Que faire quand il est minuit, qu’on est seul dans sa chambre, et qu’on n’a pas sommeil ? La réponse « regarder un film » est tout à fait indiquée. Pour m’amuser un peu, j’avais envie de voyager dans les méandres du cinéma DTV (direct-to-video, ce qui désigne les films n’étant pas exploités en salles de cinéma mais directement sur support DVD). Et comme on est en plein phénomène Jurassic World, j’ai choisi un film avec des dinosaures sur lequel je suis tombé par hasard : Extinction.


L’histoire ? Un groupe mené par un professeur renommé est envoyé au cœur de la forêt amazonienne pour étudier la faune locale. A priori, aucun danger, mais pas de bol, il y avait des dinosaures qui se cachaient derrière les arbres, et ça, c’est moins drôle ! Eh oui, ce n’est pas parce qu’une météorite a presque tout anéanti sur la surface de la Terre qu’un petit groupe de dinosaures a pu survivre pendant 65 millions d’années dans quelques hectares de forêt cachés en pleine forêt amazonienne ! Alors oui, je sais que c’est un petit film fauché, est-ce que ça donne le droit de tirer sur l’ambulance ? Tout à fait ! Accrochez-vous parce que ça va spoiler sec, mais je doute que vous vous précipitiez pour découvrir cette petite « pépite » de sitôt ! Allons Gérard, pose ce couteau ! Pose-le j’ai dit !


Le film se présente comme un found-footage, c’est à dire comme un film amateur tourné avec une caméra de qualité moyenne, exposant le point de vue d’un caméraman faisant partie du groupe. Un procédé classique dans ce genre de films à petit budget, car ça évite d’investir dans un matériel trop cher, puis au moins ça donne une bonne excuse si le caméraman a la tremblote, comme ici. Ensuite, on y ajoute des personnages ultra-stéréotypés : les guides étrangers qui ne parlent pas un mot de français, le professeur chevronné avec son chapeau, le second aventurier aux gros bras (tout est relatif) mais cool, le nerd insupportable dont on se demande ce qu’il fait là, la cruche de service, et la journaliste d’investigation toujours très moulée dans ses tenues et ayant une fâcheuse propension à toujours contredire son cameraman.


Avec ces ingrédients, on ne peut qu’avoir la garantie d’un grand moment. Ça ne commence pas si mal, mais comme d’habitude, c’est au fil de l’histoire qu’on sombre du moyen au médiocre, jusqu’au nanar. Par exemple, la première étape est franchie quand l’équipe se retrouve dans une clairière, où ils voient de grands arbres s’effondrer au fond. Quelques pas plus loin, ils tombent sur un type en chemise, archétype du chef d’entreprise qui transpire le capitalisme extrémiste, auquel ils expliquent les dangers de la déforestation, histoire de caser un message écologique bien subtil, et de vite se débarrasser de ce point. Évidemment, il n’en a rien à faire, vante les mérites de son projet, et s’en va. Ah, les clichés.


Bon, la balade dans la forêt vierge avec des dialogues bien creux, c’est bien mignon, mais je veux des dinos, moi. Patience, patience… Ils arrivent. Dans une heure. Et la rencontre est magique, avec des effets spéciaux qui provoqueront une sensation inoubliable sur la surface de votre rétine. Le reste du temps, les dinosaures sont matérialisés sous forme d’animatronics, mais ce n’est pas franchement mieux, les pauvres seigneurs de l’ère secondaire étant relégués au stade de lézards patauds et amorphes, comme en témoigne une scène mythique où le professeur, pris d’un élan de courage hors normes, décide de s’attaquer à l’un des sauriens avec son petit canif, pendant que le dino attend patiemment de se faire sauter dessus. Badass le mec !


Le film est extrêmement long, la première heure a usé ce qui me restait d’énergie. Cette longueur est vite contrebalancée par l’arrivée des dinosaures, transformant le tout en un vaste brouillon. Certains personnages subissent une mort absolument pathétique (big up Rob, tu méritais quand même mieux que ça…), les dinosaures, avant totalement absents, semblent maintenant pouvoir se téléporter à volonté pour harceler nos héros où qu’ils aillent, et puis on fait quand même référence à Jurassic Park, c’était obligé. Ils le font au moins deux fois. La première quand trois membres de l’équipe se retrouvent nez à nez avec l’un des monstres et que le nerd sort « leur vision est basée sur le mouvement « , la même sortie que Grant quand il dit aux enfants de ne plus bouger alors qu’ils sont adossés à une voiture, faisant face au T-Rex dans Jurassic Park. La seconde, c’est lors de leur tentative de fuite en Jeep, et que l’un des dinosaures, d’habitude amorphe, les pourchasse à toute vitesse pour renverser la voiture, comme dans le premier Jurassic Park où Muldoon distance le T-Rex avec sa Jeep pour sauver Ian Malcolm. Le meilleur moment reste quand même la fin, où les deux survivants tiennent une petite conférence dans ce qui ressemble à une salle de classe, en concluant que « nous n’avons pas de preuves sur nous, et pour en avoir, nous devrons y retourner« . Très bien ! Bon courage ! Ou… ou alors parlent-ils d’un Extinction 2 ? Sacrebleu !


Que faut-il retenir d’Extinction en définitive ? Sur le contenu du film même, pas grand chose, si ce n’est qu’il s’agit d’un nouveau nanar fauché avec des dinosaures, une intrigue des plus prévisibles, un rythme des plus désagréables, et plein de clichés. Mais comme c’est un nanar, on reste moqueur sans être vilain ! En revanche, cela montre bien quelque chose d’autre concernant les dinosaures et le cinéma. Les films de monstres ont généralement appartenu aux Séries B et Z, issus de petites productions, proposant donc des films de qualité souvent très moyenne. Tout cela a changé avec Jurassic Park (sans, bien sûr, oublier de très vieux films comme Le Monde Perdu de 1925, de très bonne facture). En effet, avec son film, Spielberg a créé une franchise qui a redoré le blason du genre, mais l succès et l’héritage du film ont été tels qu’il est devenu l’unique référence dans le domaine aujourd’hui.


A l’heure actuelle, il est quasiment impossible de citer des films basés sur les dinosaures, sans qu’il s’agisse de nanars, ou en excluant les documentaires. On le voit aujourd’hui avec Jurassic World, même s’il divise et déçoit certains, il est quasiment impossible de trouver d’autres productions de qualité parlant de ces chers vieux lézards. Est-ce une raison pour dire qu’Extinction ne doit pas exister ? Non, car il permet de relativiser, et de se dire qu’avec « Jurassic Word » (pour citer la superbe erreur sur leur affiche de promo), l’année 2015 est bien l’année des dinosaures.


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le 16 juin 2015

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