Importé du pays des kangourous, Fantastic Birthday, le premier long-métrage de l’australienne Rosemary Myers transforme le teen-movie en un conte allégorique baroque, une comédie que l’on savoure comme un bonbon acidulé



Fallait-il attendre l’enthousiasme d’une cinéaste venu du théâtre pour édulcorer un moment singulier de l’existence ? A l’instant même où la transformation universelle s’opère inéluctablement, celle qui fait de nous, de la veille au lendemain, de jeunes adultes responsables alors que le corps enclenche à grande vitesse sa mutation. FANTASTIC BIRTHDAY ne sera peut-être pas la pépite indé de l’année mais il transportera chaque spectateur au cœur d’une scène bariolée d’ornements kitsch, dont les bois entremêlent avec enchantements les essences extravagantes de Michel Gondry, Spike Jonze et Wes Anderson. On commettrait pourtant une grave erreur, celle de dissoudre ces premiers pas sur grand écran dans un simple essai d’esbroufe, voire de plagiat du réalisateur acclamé du Grand Budapest Hotel, Rosemary Myers parvenant à échafauder une teen-comédie aussi référencée qu’originale.


FANTASTIC BIRTHDAY s’ouvre sur un banc d’une cour de collège. Greta (Bethany Whitmore) et Eliott (Harrison Feldman) échangent déjà des répliques aussi banales que farfelues d’une rencontre hésitante entre deux élèves. Dans ce cadre 1:33, en mouvement ininterrompu, le loufoque s’amuse à l’arrière-plan et un défilé d’absurdités s’invite dans ce gênant dialogue, comme si la maladresse était une comédie. Le ton est donné, au vu de ces premières minutes singulières qui construisent la promesse d’une invitation dans un monde folklorique, où rien n’as de sens. Mais voilà qu’à peine rentrée d’une dure journée d’études, Greta est sommée par ses parents d’organiser une fête d’anniversaire alors que ses 15 ans approchent à grand pas. Et à sa réaction, on se doute bien que la jeune fille est tracassée par l’idée de mûrir.


FANTASTIC BIRTHDAY ne rechigne pas à s’emparer du sujet un avec un ton léger et humoristique. A la réalisation, Rosemary Myers fait preuve d’une certaine audace, colorée et cocasse. Sur cette base, le long-métrage ne se refuse pas d’être d’une séduisante inventivité. Car, en multipliant la fluidité et la liberté de sa caméra, le ressort comique de ces ahurissants personnages trouve un certain écho dans le cinéma biscornu de Wes Anderson. Dès lors, les festivités commencent et la galerie ubuesque d’invités parade, amuse et danse au rythme des envolées musicales disco-funk des années 1970. En particulier, on trouvera une légion de chemises ouvertes sur pattes d’éléphant, à la moustache bien taillée, tout droit sortie d’un épisode parodié de la série télévisée That’s 70 Show.



« Fantastic Birthday parvient à échafauder une teen-comédie aussi référencée qu’originale »



Puis, tout en rappelant Max et les Maximonstres de Spike Jonze, le rêve, ou plutôt le cauchemar, emporte FANTASTIC BIRTHDAY vers la lisière fantasmagorique où se dessine en creux l’allégorie du refus de grandir. Signe que le changement inexorable est à l’ordre du jour, Greta se réfugie dans ce qu’il lui reste d’enfance devant les grands chambardements qui l’attendent : rejoindre le cercle des jeunes filles devenues femmes avant elle, entamer contre son gré la découverte de la sexualité, observer ses irréversibles transformations physiques et constater, engourdie, la fin manifeste d’une époque. Et alors que l’inquiétante catharsis d’une forêt hostile progresse avec effroi, Rosemary Myers nous rappelle, in fine, la délicate étape que constitue cet unique passage à l’âge adulte. Un instant dans sa vie qu’il faut savoir accepter avec optimisme.


Par Sofiane, pour Le Blog du Cinéma

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le 31 mars 2017

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