Quand j'ai entendu parler de ce préfixe, et de ce qu'il voulait dire, j'ai commencé à le voir partout. Métaphysique, métaceinture, métabouteillofrigo, métariencomprisouquoi... tout me semblait à la fois être et parler de ce qu'il était. Un homme dans la rue, par exemple, était pour moi un SDF, mais il devenait aussi le miroir lucide d'une société individualiste où l'humain se précarise chaque jour un peu plus. Un enfant dans un parc jouait au foot, mais il gravait aussi de ses semelles dans l'herbe mouillée le manifeste intemporel de la candeur.


Ça m'a un peu submergé, plus rien n'avait le droit d'être brut. D'être ce qu'il est, dans un temps réduit, et d'être autre chose ensuite sans connexion possible. Sans logique. Les choses, dans le chaos ambiant, devaient toutes prendre un sens. Et toute exception confirmait la règle. L'enfant candide qui 20 ans plus tard massacre sa famille ne se contredisait pas, il parlait seulement de l'innocence perdue. Mais il parlait d'innocence quand même.


Or dans le cinéma, la pensée méta, au-delà de vous faire tourner en bourrique sur chaque film, vous nique complètement l'esprit critique. C'est simple, j'étais devenu le meilleur public du monde. Et pas juste « même quand c'est nul, j'arrive à m'amuser ». Mais vraiment « non c'est pas nul, c'est un métafilm. C'est un acteur en grosse galère de réput' qui fait un film sur un rappeur en grosse galère de réput'. Le rappeur, comme l'acteur, dans ce film, revient sur le devant de la scène. D'un point de vue méta, c'est au moins au niveau de Lost in La Mancha, sauf que là c'est écrit. Bim! Quel film de génie! ».


Comme je vous disais ça m'a pas mal niqué le cerveau. Au-delà de m'amuser devant des films nuls, l'esprit méta m'a carrément fait voir du génie partout. J'étais alors incapable de pertinemment juger la qualité d'une œuvre, au point de défendre bec et ongles le génie de la saga Sharknado. Cela m'a fait beaucoup de tort.


Mais c'était une étape nécessaire, pour revenir aux choses simples. En même temps parfois je me demande si je suis vraiment revenu à la simplicité, ou si je n'ai pas plutôt des réflexions méta sur la pensée méta. Dans ce dernier cas, il faudrait que je m'inquiète, parce que j'entame alors très probablement un cercle vicieux mental digne des pires épisodes de Black Mirror.


Pour m'en prévenir quand même, il me reste Fatal, et Sharknado, et plein d'autres films dans leur genre. Plein de films sur lesquels je vais tenter de porter un regard nouveau, plus authentique. Moins méta. Pour l'instant ça va, et ça me réchauffe le cœur, parce que les notes n'ont pas l'air d'avoir envie de changer. À moins que ce soit moi qui ne change pas...

Vernon79
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le 31 juil. 2017

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Vernon79

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