Des produits laitiers et des amis pour la vie

First Cow se veut être la transgression du Western. La cinéaste indépendante Kelly Richardt affiche cette intension dès sa première séquence en filmant plan fixe un navire marchand traversant le cadre de la caméra dans toute sa longueur, un cadre au ratio inhabituel 1,37:1. Autant dire c’est une image carrée qui affichera de belles et larges bandes noires sur votre TV.


Or, le Western nous a accoutumé à des plans larges dans des formats anamorphiques (Cinémascope) pour apprécier la grandeur des paysages de l’Ouest américain. On aurait apprécié ce type de ratio 2,39:1 pour la séquence du navire, mais c’est en réalité que stratagème à en croire la réalisatrice, voyez plutôt.


La première séquence du navire annonce alors la couleur d’un Western ôté de tous ses standards de fond et de forme qui nous semblaient jusqu’à alors, indéfectibles et immuables au genre. Bien, mais que reste-t-il ? Et de quoi s’agit-il ?
- Un slow drama. Un drame dans lequel le cadre de l’image se resserre littéralement sur les deux protagonistes du film, ces derniers faisant drôlement écho au duo de personnages issu des films Shanghai Kid [je vous laisse le soin de noter sur 10 l’utilité de cette opinion en commentaire].


En bref, on reste assez sceptique quant à cette proposition qui ne raconte pas de manière maladroite certes mais qui raconte peu. Le thème de ce métrage n’est pas la viande bovine comme pourrait laisser le supposer l’affiche : Fist Cow est une histoire d’amitié avant tout. Le souci est que cette amitié est trop ébauchée, trop timide, difficilement perceptible. Elle manque de délicatesse même si elle s’étoffera un chouia lors d’une querelle de clocher presque dispensable. Une amitié qui en trois mots manque de cinéma.


On apprend par ailleurs peu de chose des personnages, et on en sait encore moins du contexte local et historique. J’ajouterai comme commentaire au risque de dévoiler ma schizophrénie, que rien n’est toutefois défectueux dans First Cow, ni la mise en scène, ni les interprétations, ni les décors réalistes et minimalistes, ni même la photographie.


Sceptique donc, parce qu’à notre époque où la société impose un modèle de consommation « Quick-Service », nombre d’auteurs font de la lenteur un critère systématique de qualité et d’anti-conformisme. Et ces temps ci j’en fais mon cheval de bataille : non tous les films lents, contemplatifs et esthétiques ne sont pas des labels d’excellence. First Cow en est la preuve.

Jordan_Michael
6
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le 6 mars 2022

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