Fleur du Désert n'est pas le film à retenir au niveau artistique, mais rien que pour l'histoire qu'il raconte. On m'avait chaudement recommandé ce film, en me précisant qu'il parlait d'un sujet peu connu, l'excision des femmes. Personnellement, je ne voyais que vaguement de quoi il s'agissait, et c'est sans me douter de l'atrocité de la chose que je me suis lancée dans le visionnage de ce film.


Waris est née en Somalie. Là-bas, comme la majeure partie des petites filles, elle est excisée, c'est-à-dire qu'elle subit une mutilation sexuelle, l'ablation du clitoris et des petites et grandes lèvres. Puis, on recoud l'entrée du vagin, ne laissant qu'une petite ouverture de la taille d'une tête d'allumette ; inutile de vous préciser que l'opération est faite dans des conditions d'hygiène déplorables, par une femme du village à qui l'on a attribué la tâche, en compagnie de la propre mère de la petite fille. Pourquoi l'excision ? Pour des raisons principalement religieuses et traditionnelles : il s'agit, selon les partisans de cette pratique, de préserver la virginité de la femme, de s'assurer qu'elle gardera sa vertu jusqu'au mariage, jour où son mari pourra "ouvrir" son vagin à l'aide d'une lame avant de coucher avec elle, de force dans la plupart des cas. Je vous laisse imaginer la souffrance et la douleur engendrées par cette pratique abominable... que ce soit pour aller aux toilettes, les menstruations, ou encore l'accouchement. Ces femmes, mutilées, le sont à jamais, sont blessées dans leur dignité, humiliées, comme si leur sexualité était une honte. De plus, si elles ne sont pas excisées, elles sont tout simplement bannies de leur village et réduites au statut de prostituées. Ajoutons qu'elles sont également "chanceuses" si elles survivent à l'opération, car beaucoup en meurent.


Waris est excisée à l'âge de trois ans. A treize, elle est promise en mariage à un homme ayant le triple de son âge en échange de quatre chameaux (admirez la valeur de sa vie). Elle s'échappe la veille de la cérémonie et s'enfuit à travers le désert jusqu'à la ville où elle retrouve sa grand mère, qui l'aide à fuir la Somalie jusqu'en Angleterre, où elle travaille comme femme de ménage à l'ambassade somalienne pendant six ans. Quand l'ambassade ferme suite à la guerre civile en Somalie, Waris se retrouve à la rue et devient SDF, sans savoir parler un mot d'anglais. Elle rencontre par hasard Marylin, une vendeuse chez Topshop qui l'aide à trouver un logement et un boulot. Elle bosse dans un fastfood et se fait repérer par un photographe de mode célèbre. Elle rejoint une agence de mannequins, enchaîne les podiums et se fait arracher par tous les magazines ; devenue alors un des plus grands top models du monde, elle en profite pour témoigner de l'atrocité qu'elle a vécu étant petite, et devient ainsi ambassadrice de bonne volonté à l'ONU, et se battra pour dénoncer l'excision.


J'ai adoré ce film. C'est un grand coup de coeur, déjà de part le sujet, qui m'était pratiquement inconnu, puis par ses acteurs : une actrice principale attachante, un peu niaisouse sur les bords, qui débarque d'un monde complètement différent, au visage sublime, au sourire renversant, interprétée par Liya Kebede (ressemblant d'ailleurs comme deux gouttes d'eau à la véritable Waris Dirie : http://www.hola.com/imagenes/biografias/waris-dirie/88456-waris-dirie.jpg). Marylin, la bonne copine qui galère un peu dans la vie mais qui sera toujours là pour aider Waris, marrante, grande gueule, touchante et maladroite, jouée par Sally Hawkins (vue dans Blue Jasmine de Woody Allen).


Le film joue entre le présent, c'est-à-dire l'ascension de Waris dans le monde de la mode, et les flashbacks, quand elle n'est encore qu'une petite fille et qu'elle vit en Somalie. Pendant une bonne heure trente, je suis encore peu frappée ou choquée par l'excision : oui c'est affreux, mais je ne réalise pas... Et, tout à coup, flashback. "J'avais trois ans". Sa mère l'emmène voir la femme qui va la mutiler. Et cette scène, nul besoin de vous le préciser, est horrible. Mais elle m'a fait prendre conscience de cette chose immonde qu'on inflige à des petites filles. Et merde de merde, je ne veux pas vivre dans un monde où l'on humilie comme ça des enfants innocents. Je refuse, je me barre, vous dis-je ! Clairement, je ne veux pas créer un sale débat ou alimenter les polémiques, mais au lieu de se trimballer les seins à l'air dans la rue en beuglant comme des poissonnières, les Femen feraient mieux de se battre pour éradiquer la pratique de l'excision dans le monde entier.


J'avoue ne pas être totalement objective par rapport à ce film : je lui met huit, alors qu'en soit ça vaut moins niveau artistique etc.. mais je ne me résous pas à lui mettre plus ou moins ; cette histoire m'a donné une bonne claque dans la gueule, m'a vraiment touchée et je vous le recommande vraiment.


Waris, je t'annonce officiellement que je suis dingue de toi<3


"Les gens doivent comprendre que la mutilation génitale féminine n'a rien à voir avec la tradition, la religion ou la culture. C'est une forme perverse d'abus infligé aux enfants. Tous les pays du monde devraient prendre de sérieuses mesures contre ceux qui commettent ces crimes." - Waris Dirie


"Bouge ton petit cul squelettique darling" - la nana de l'agence de mannequins

ravenclaw
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le 29 oct. 2014

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le 29 oct. 2014

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ravenclaw

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