Si deux têtes valent mieux qu'une, ça ne devrait pas être meilleur avec trois ?

En dix ans, Godzilla aura su se faire une place dans le cinéma japonais (si ce n’était pas déjà fait avec le tout premier film) mais également dans le monde entier. Digne représentant du Kaiju eiga, ces films offrant des combats de titans qui détruisent tout sur leur passage. Un genre qui a vu tant de monstres naître (Mothra, Rodan…) et qui se sont affronter dans des navets souvent assumés. Et pendant ces dix ans, une monotonie s’est installée. Et pour cause, voir les mêmes bestioles se battre entre elles, cela n’a plus rien de réjouissant. C’est sans doute dans cette optique qu’à été réalisé Ghidrah, le monstre à trois têtes, « film Godzilla » inédit en France.

Déjà, ce nouvel opus marque les premiers pas d’une nouvelle créature à rajouter au bestiaire des Kaijus : Ghidrah (ou King Ghidorah). Un monstre venu de l’espace et qui se présente alors comme la plus grande menace qu’ait connu notre planète. Encore plus dangereux que ne l’avait été Godzilla et ses semblables, c’est pour dire ! Une sorte de dragon à trois têtes, chacune crachant un « laser » qui cause d’innombrables dégâts. Il n’y à qu’à voir quand le monstre entre en action, provoquant à chacun de ses passages des explosions à tout-va. Un pouvoir phénoménal allier à une vitesse de vol qui renforce la lenteur exécrable de Godzilla.

Comment les humains pourront-ils survivre à cela ? Eh bien par la plus improbable des idées : réussir à unir des monstres qui les terrorisaient autrefois pour que ceux-ci fassent face à Ghidrah. C’est ainsi que va se former la trinité Godzilla/Mothra/Rodan, pour nous sauver. Une grande nouveauté dans le monde des Kaijus eiga, nous faisant changer de point de vue vis-à-vis de certaines de ces créatures dévastatrices nées comme tel. Bon, pour Mothra, cela n’affecte en rien son statut d’être bienveillant. En revanche, cela efface le côté animosité de Godzilla et de Rodan qui, au lieu de détruire, vont combattre pour la survie (et pas que la leur), devenant ainsi des sauveurs et non des démons. Un détail réellement rafraichissant, malheureusement non sans défauts…

Pour que des monstres s’unissent, il faut qu’ils communiquent entre eux, cela va de soit. Ne vous inquiétez pas, ils ne se mettent pas soudainement à parler (manquerait plus que ça !). Non, la discussion qu’ils entretiendront au beau milieu du film sera « traduite » par des personnages témoins à la scène. Mais franchement, de commentateurs, nous n’en avions pas besoin car comprendre ces titans, c’est comme regarder un enfant parler ! Détruisant en une simple séquence l’aura terrifiante de Godzilla et consorts : lors de leur affrontement, Godzilla et Rodan seront arrêtés par Mothra via la soie qu’il sécrète. Un geste qui provoquera une sorte de fou rire alternativement entre les deux combattants (pour preuve, Godzilla se plie en quatre, les pattes avant sur les genoux, la gueule grande ouverte). Alors, depuis tout ce temps, les duels qui rasaient des villes entières n’étaient en réalité que de simples chamailleries ? La notoriété des films précédents en prend un coup, c’est certain !

Autre nouveauté qu’amène Ghidrah : l’entrée des Kaijus eiga dans la science-fiction ! Depuis le début, nos bestioles n’étaient (un bien faible mot, tout de même !) que de banals dinosaures « modifiés » via le nucléaire. Là, le nouvel adversaire du jour vient de l’espace. Induisant le fait que nous ne sommes pas seul dans l’univers. Bien qu’il n’y ait pas de soucoupes volantes ou encore de petits hommes verts, cela n’empêche pas le scénario de se permettre quelques fantaisies. Notamment celle d’une personne royale possédée par un être venu de Vénus pour nous prévenir de l’Apocalypse.

Un détail scénaristique qui entraîne l’intégralité du script dans le décoratif pur et dur ! Le gros problème avec les Kaijus Eiga est qu’il y a toujours une histoire humaine qui est mies sur le devant de la scène, histoire de meubler le film qui, apparemment, ne peut se contenter des monstres pourtant en tête d’affiche. Avec Ghidrah, nous tenons là un record ! Une princesse qui sert de vaisseau spirituel à un extra-terrestre, des antagonistes qui cherchent à l’éliminer, un détective qui tente de la protéger… Un véritable complot politique, aux airs de thriller, s’offre à nous alors que ce n’est délibérément pas le sujet du film ! Et tout cela pour nous faire patienter au combat tant attendu, au bout d’une cinquantaine de minutes, et encore ! Non seulement cela semble passer au second plan, mais en plus, cela prend le pas sur la seule bonne idée du script : intégrer les monstres à la culture humaine, vu qu’ils sont connus de tous (via une séquence où les fées accompagnant Mothra participent à une émission de télé).

Et n’oublions pas, bien entendu, ces costumes en latex et maquettes qui n’arrivent plus à cacher leur nature de LEGO. Ces ralentis qui ne sont mêmes plus utilisés alors qu’ils permettaient de restituer le poids et la lenteur de ces titans. D’un montage désormais réalisé au couteau, où certaines séquences se finissent sans aucune raison sur un fondu en noir (notamment les premières apparitions de Godzilla et de Rodan). Le côté navet et vieillot de la saga se remarque de plus en plus et cela n’aide vraiment pas !

Ghidrah, le monstre à trois têtes a beau lancer quelques nouveautés dans le genre, il n’arrive toujours pas à retrouver la puissance de Godzilla premier du nom ! Pire, il n’arrive même pas à la cheville de ce qui a déjà été fait chez le gros lézard (sauf un catastrophique King Kong contre Godzilla). À ce rythme là, les Kaijus eiga auront perdu de leur notoriété !
sebastiendecocq
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le 4 mars 2014

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