Godzilla
7.2
Godzilla

Film de Ishirô Honda (1954)

De la plaie béante qui s’est ouverte en 1945 à Hiroshima et Nagasaki est né, 12 ans plus tard, Godzilla, film de monstre sur fond de thématique nucléaire.


Godzilla installe une ambiance inquiétante et fait sentir la présence d’un danger qui met du temps à montrer son visage. Enfin apparaît ce monstre, libéré d’une grotte souterraine par les essais nucléaires. Monstre à la peau rocailleuse doté d'une superbe épine dorsale. Debout sur ses deux pattes arrières, il avance d’un pas massif et détruit tout comme de simples châteaux de cartes, répandant autour de lui, de son souffle puissant, une mer de feu, se dressant au-dessus des flammes, émergeant de la fumée. Véritable vision apocalyptique, il dégage une présence « surnaturelle ».


La caméra subjective nous fait voir à hauteur de son regard les gens qui fuient dans les rues ou à hauteur du regard des victimes d’une tour, le sol qui se rapproche à toute vitesse. La musique entêtante scande l’avancée du monstre contre lequel les balles, les tanks, les avions de tirs sont impuissants.


Outre les scènes avec Godzilla, ce qui domine l'intrigue ce sont les réactions des personnages, les questions qu'ils se posent : tuer le monstre et se priver de découvrir comment il a pu échapper à la radioactivité ? Tuer le monstre en rendant publique la découverte d’une arme encore plus dangereuse que le nucléaire et dont l’homme pourrait une fois de plus faire un mauvais usage ? Tuer le monstre, quoi qu’il en coûte, pour sauver les innocents qui emplissent les hôpitaux ou les cimetières ?


Le film sonne comme un avertissement face aux menaces que la technique peut engendrer et être incapable d’endiguer. La prière chantée qui intervient vers la fin du film traduit son message comme un appel pressant, prière adressée aux hommes autant qu’à Dieu ! Godzilla n’est pas un simple film de monstre, mais un film sur la responsabilité humaine face à ses découvertes qui peuvent être retournées contre l’homme. Le choix du docteur Serizawa, dans ce contexte, est emblématique et prévisible. C’est le seul choix censé qu’il pouvait faire s’il voulait être cohérent avec lui-même.


Godzilla inaugure le kaiju eiga japonais, genre de film mettant en scène des monstres géants. Les kaiju eiga vont se succéder les uns aux autres. Pour n’en citer que quelques-uns : Rodan, un oiseau géant : Mothra, une mite géante ; Gamera, une tortue et bien d’autres encore, sans compter les suites directes de Godzilla. Le point commun de ces films étant, outre la trame scénaristique, leur esthétique : ce sont des hommes qui revêtent le costume du monstre et qui écrasent des décors en carton pâte. Le genre durera plusieurs années avant de s’essouffler vers la fin des années 60. Mais Godzilla est sans aucun doute le plus réussi par le message qu’il a su délivrer sans verser dans la surenchère et par le thème omniprésent de la menace et des conséquences du nucléaire.

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le 12 mars 2022

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abscondita

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