Quelle horreur

Le choix de ce film pour ma première critique n'est pas innocent, il m'a provoqué une réaction pour le moins épidermique et ce dés les premiers instants. J'aurais aimé pouvoir mettre plusieurs notes à Goodnight mommy tant il m'a laissé de fortes impressions très oppposées.

D'un point de vue purement cinématographique d'abord, le film est très réussi. Dés les premières images, on découvre une photographie bien travaillée. Le décor planté laisse rêveur entre l'immense maison moderne et la nature qui l'entoure. Tout est beau et propre, les cadrages et la lumière viennent appuyer cette sensation d'ordre et de sérénité. La photographie évolue au long du film, collant de près aux changements d'ambiance, sans jamais forcer, sans dénaturer les instants qu'on passe dans ce malaise familial. C'est selon moi toute la force visuelle du film, qui allie parfaitement les belles images de cinéma tout en gardant un réalisme froid, chose rare dans ce genre de films qui a parfois tendance à abuser d'effets visuels pour appuyer son propos. C'est ici le cas à quelques reprises mais toujours bien amené et de bon goût.
Les personnages évoluent très naturellement dans ce décor et le jeu des acteurs, tout en sobriété, donne le sentiment étrange d'assister à des instants de vie qu'on ne devrait pas voir. L'innocence des garçons, l'étrangeté de la mère, des scènes de famille parfois banales mais toujours intimes, le spectateur en sait peu et assiste avec gène à ces images, loin de l'omniscience qui permettrait de comprendre, d'anticiper et de prendre de la distance. C'est un peu comme surprendre une conversation qui ne nous serait pas destinée, on sait qu'on ne devrait pas mais on a envie d'écouter malgré tout.
La réalisation ne fait quant à elle pas défaut, le rythme est bien géré et un soin particulier a été apporté à la cohérence de l'ensemble. C'est digeste, la longueur est correcte et les quelques inégalités sur la fin n'entachent pas le reste du récit très bien mené.
C'est donc un film que je recommande vivement d'un point de vue cinématographique. Soigné sans être prétentieux, il évite bon nombre d’écueils inhérent au genre horrifique, même si je pense après visionnage qu'on ne peut pas parler de film d'horreur au sens communément admis du terme.

Je pourrais donc m’arrêter ici mais comme précisé plus haut, je ne peux pas me résoudre à ne juger le film que sur ses qualités techniques. Je suis bien plus divisé par l'aspect moral de Goodnight mommy qui m'a profondément dérangé. Je ferai court sur ce point afin de ne pas en dire trop sur l'histoire mais le sens moral du spectateur est mis à mal devant un certain nombre de scènes. Le réalisme ambiant renforce le malaise jusqu'à en devenir insoutenable. Plus suggérées que graphique, la violence et l'horreur sont pourtant bien présentes et m'ont personnellement frappées comme rarement, me poussant quasiment à couper le film. C'est bien sûr très subjectif et variable selon le rapport du spectateur aux thèmes abordés mais dans l'ensemble, les réalisateurs ne font pas de concessions et livrent très froidement leur histoire.

C'est un film à voir d'urgence selon moi mais à ne pas mettre entre toutes les mains. La où l'horreur classique nous offre souvent une porte de sortie en usants de procédés permettant une prise de distance avec le sujet, Goodnight mommy nous montre une horreur bien palpable, presque réelle, venant chercher des émotions brutes sans prendre de pincettes. Mais n'est-ce pas ce qu'on attend d'un bon film, et a fortiori des films de genre, souvent malmenés depuis leur retour dans les bonnes grâces d'Hollywood ?