Je n'avais encore jamais vu de film de Mathieu Turi, jeune cinéaste français spécialisé dans l'horreur qui sévit depuis un peu plus de dix ans maintenant, dans une relative discrétion. L'argument lovecraftien m'a cette fois-ci permis de sauter enfin le pas. Son troisième long métrage nous plonge dans les mines du Nord de la France où, chargée d'accompagner un scientifique dans les tréfonds de la terre, une bande de mineurs réveille par mégarde une divinité monstrueuse. L'idée, pas si saugrenue, de croiser Germinal et Cthulhu aurait pu donner un ersatz sans grand intérêt de The Descent ou un énième survival prévisible de bout en bout. Mais, animé d'une belle conviction, épaulé par une petite troupe d'acteurs sympathiques, et fort d'une perspicacité devenue trop rare pour certains aspects décisifs du projet, Mathieu Turi emporte rapidement notre bienveillance et, en fin de compte, réussit globalement son film.
Déplacer la mythologie lovecraftienne, ou du moins certains de ses éléments caractéristiques, dans une zone ouvrière marquée par la rudesse des paysages, des hommes et de leur travail s'avère malin et judicieux. Dès les premières minutes, un soin particulier est apporté à la reconstitution de l'époque et de l'univers minier. Avec simplicité, sans trop appuyer le trait, le réalisateur plante le décor habilement, efficacement. On pourra éventuellement regretter, a posteriori, cette scène d'introduction pas forcément utile qui a pour seul intérêt de nous éclairer sur ce qui nous attend, au détriment de l'effet de surprise à venir. Peut-être s'agit-il là de l'expression d'un léger manque de confiance d'un cinéaste qui aurait peur, sans ce stratagème archiconnu des amateurs de frissons, de ne pas accrocher son public ou de l'ennuyer. Reconnaissons toutefois que l'ambiance est déjà plutôt réussie lors de ces sombres premières minutes qui sont accompagnées des chants traditionnels des mineurs...lire la suite de la critique.