Harry Potter et le Prisonnier d'Azkaban est de très loin le meilleur film de la saga du plus célèbre sorcier à lunettes. Il ne s'agit pas ici d'une simple illustration fidèle du livre puisqu'on remarque également un vrai travail d'adaptation et de mise en scène qu'on ne retrouvera malheureusement plus par la suite. Alfonso Cuarón possède un véritable imaginaire, sa mise en scène est élégante et il ne semble pas craindre de laisser des choses de côté. Là où son prédécesseur et ses successeurs prennent bien soin de tout expliquer clairement et de ne rien laisser de mystérieux, Cuarón maintient volontairement certaines choses (certes secondaires) inexpliquées où se contente de les suggérer sans que ça ai une incidence sur notre compréhension de l'histoire. L'intrigue elle-même est d'ailleurs plus difficile, le thème du voyage dans le temps créant une double temporalité, par essence plus complexe.


Le Prisonnier d'Azkaban marque par ailleurs le véritable point de bascule de la saga. L'école de Poudlard est enfin ancrée dans un paysage réel avec une véritable identité : l'Écosse. L'action du film se déroule par ailleurs en grande partie en extérieur et n'est plus circonscrite dans le château. Beaucoup de changements donc dans la géographie des lieux mais également dans l'apparence de nos jeunes héros. Finis les pulls en laine et les jupes plissées, désormais ils s'habillent en jeans et sweat-shirt. Car ils ont bien grandis et sont désormais adolescents.


Par conséquent, ce volet de la saga est moins enfantin et plus mature que les deux premiers. Plus sombre également. Ce qui se remarque en premier lieu dans l'imagerie du film. Des détraqueurs cernant Poudlard, un énorme chien noir surgissant d'une haie, le bourreau aiguisant sa hache, le visage de fou furieux du criminel Sirius Black sur les avis de recherche apposés sur tout les murs, ce même Sirius dans ses guenilles de prisonnier avec ses cheveux gras et son teint cireux... Tout ça est bien glauque. De même, se dégage une sensation de danger diffus en partie du fait des nombreuses séquences de nuit, tandis que même les séquences de jour se trouvent pour la plupart dans une lumière terne où les recoins sombres se multiplient. Les passages baignés de soleil se comptent sur les doigts de la main (c'est très simple, à part le cours de Hagrid, il n'y en a pas).


Mais le plus révélateur est la démarche de Cuarón, qui consiste à détourner les passages obligés instaurés par les précédents films en les commençant souvent de manière amusante où du moins banales puis en les terminant sur quelque chose de beaucoup plus dramatique et sombre. Comme avant, le film s'ouvre sur Harry passant ses vacances d'été chez son oncle et sa tante, les Dursley. La confrontation avec Marge est le sort réservé à celle-ci est très drôle mais la séquence se termine sur Harry quittant le domicile familial au milieu de la nuit et échouant dans un sordide parc de jeux désert. Lors du voyage à bord du Poudlard Express, les lumières s'éteignent et un détraqueur « agresse » Harry avant d'être repoussé, le tout se terminant sur le visage livide de Harry reflété sur la vitre battue par la pluie. Il y a d'ailleurs un peu du film d'horreur durant cette séquence. Le premier soir à Poudlard, Harry et ses compagnons de chambrée s'amusent joyeusement tandis que la caméra recule pour nous révéler les détraqueurs encerclant le château. Le premier cours (de divination en l'occurrence) commence comme une vraie comédie avec l'hilarante Emma Thompson dans le rôle du professeur et se termine par la menace que représente le sinistros visible dans les feuilles de thé de Harry. Enfin, le match de quidditch se déroule en plein orage et fini sur la chute de Harry suite à l'intervention des détraqueurs.


Le processus est donc enclenché, qui doit mener la saga vers plus de maturité. Pourtant, Le Prisonnier d'Azkaban ne tourne pas le dos à l'humour, avec un côté plus cartoonesque que précédemment (Marge qui enfle comme un ballon, Stan et le Magicobus, Harry et Hermione contre le saule cogneur).


Enfin, il faut évoquer le casting. C'est la tradition, à chaque film ses nouveaux personnages souvent interprétés par des pointures du cinéma britannique. Ici la palme revient évidemment à Gary Oldman en Sirius Black même s'il ne faut pas oublier le plus discret David Thewlis dans le rôle du professeur Lupin. Les jeunes acteurs commencent également à s'affirmer, et en particulier Daniel Radcliffe qui doit désormais jouer un Harry Potter différent, qui pour la première fois révèle un caractère plus violent et torturé loin du personnage lisse et même un peu terne des premiers films. Et puis c'est un plaisir de voir enfin Rogue (Alan Rickman) dans un rôle de premier plan.

Eldacar
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films d'Alfonso Cuarón

Créée

le 19 août 2016

Critique lue 357 fois

1 j'aime

1 commentaire

Eldacar

Écrit par

Critique lue 357 fois

1
1

D'autres avis sur Harry Potter et le prisonnier d'Azkaban

Harry Potter et le prisonnier d'Azkaban
Citizen-Ced
9

Chapitre 3 : OMFG, pourquoi ne pas avoir fait ça 7 fois ?!?

Après deux adaptations sympathiques mais un peu figées et manquant tristement de magie (le comble), voici enfin un film à la hauteur de l'immense œuvre de JK Rowling. Alfonso Cuaron bouleverse un peu...

le 4 avr. 2012

66 j'aime

7

Du même critique

Dieu seul le sait
Eldacar
7

Critique de Dieu seul le sait par Eldacar

A la fois drame et film de guerre, Dieu seul le sait est une œuvre méconnue de John Huston qui n'est pas sans rappeler le beaucoup plus célèbre The African Queen du même Huston. Interprétés avec...

le 20 août 2016

4 j'aime

L'Homme qui tua Liberty Valance
Eldacar
9

Critique de L'Homme qui tua Liberty Valance par Eldacar

Certainement l’un des plus grands westerns du cinéma, d’une mélancolie sans équivalent dans le genre. Porté par un superbe noir et blanc et la réalisation toujours aussi discrète et efficace de John...

le 19 août 2016

2 j'aime

Harry Potter et le prisonnier d'Azkaban
Eldacar
8

Critique de Harry Potter et le prisonnier d'Azkaban par Eldacar

Harry Potter et le Prisonnier d'Azkaban est de très loin le meilleur film de la saga du plus célèbre sorcier à lunettes. Il ne s'agit pas ici d'une simple illustration fidèle du livre puisqu'on...

le 19 août 2016

1 j'aime

1