Au cinéma, pour peu que l'on soit cinéphile il y a des films pour nos humeurs. Parfois on peu juste vouloir voir le blockbuster gras du moment, ça détend le temps du visionnage et on oubli ensuite cette incartade prise en douce un soir de fatigue intellectuelle. Puis il y a une autre catégorie de films, inclassables, que l'on ne peut pas mettre des les cases si pratique des genres cinématographiques. Une classification marketing qui réduit parfois certains films à de simple produits alors qu'ils sont tellement plus.


Ainsi Homo Sapiens se trouve être un "documentaire". Pourtant, c'est en même temps bien plus que ça et pas du tout ça, mais il fallait le mettre dans une case. Sans parole, sans musique, avec des images quasiment fixes, voici des critères qui feraient fuir tout producteur bien élevé. Un film qui n’aurait jamais vu le jour sans l’avènement de l'Internet, des dispositifs d'imageries numériques et des plateformes vidéo tel que Youtube. Ces éléments ont tous contribué à mettre sur le devant de la scène une discipline pratiquée par de nombreuses personnes depuis des décennies mais rendu confidentielle volontairement mais aussi par manque de diffusion. C'est une activité certes pas toujours légale, risquée mais tellement belle et enrichissante. Homo Sapiens est une introduction à l'exploration urbaine.


Les plus proche cousins d'Homo Sapien sont Baraka et la série des Qatsi qui ont déjà bien plus de 20 ans et mettent en avant l'activité humaine. Homo Sapiens n'est pas aussi riche qu'un Baraka, au contraire. Plutôt que de rythmer cette activité humaine avec de la musique, des objectifs grand angle et un fabuleux travail sur la lumière, Homo Sapiens montre les vestiges de celle-ci au travers de lieux abandonnés ou transformés par l'Homme directement ou indirectement.


Étant à mon humble niveau "explorateur urbain" je ne pouvais absolument pas passer a côté de ce film extraordinaire. Depuis que le cinéma existe, il a utilisé maintes fois des lieux abandonnés pour créer un décor, une ambiance particulière. On trouve ce procédé dans de nombreux films. Des lieux comme le tunnel Wellington au Canada, l'ile d'Hashima au japon, la montagne du diable aux État Unis, les Forges de Clabecq en Belgique ou les friches industrielles du canal de l’Ourcq à Pantin. Mais jamais un film n'avait mit en valeur ces lieux tel qu'ils sont.


Ainsi, un lieu habituellement plein de vie, comme ces gigantesques mall américain, devient soudainement un endroit hors contexte, sortit de sa fonction première il semble être une espèce de temple antique dont l’utilité n'est pas bien déterminée. Un gigantesque cuirassé fruit de l'ingénierie humaine pourrit doucement sans espoir d'être un jour à nouveau à flots. Le monument de Bouzloudja, ode au régime soviétique, œuvre de 6000 personnes et de 7 ans de construction ne représente plus que le passé d'un régime effondré. Fukushima, vidée de toute vie, figée dans le temps, des publicités sont encore dans leurs présentoirs, des vers posés sur un comptoir comme si leur propriétaire allait revenir. Des vélos rangé et attaché attendant d'avoir à nouveau une utilité.


D'autre lieux surréalistes, extraterrestres vous attendent et ils vous prendront aux tripes vous faisant osciller entre fascination et mélancolie. Homo Sapiens est bien plus qu'un documentaire, c'est une vérité crue sans artifices de ce que nous pouvons laisser derrière nous. Non pas par idéologie écolo comme il a été beaucoup dit sur ce film. Mais pour montrer quand, dans plusieurs milliers d'années, lorsque l'Homme découvrira à nouveau son passé au travers des constructions de ses ancêtres, qu'il se demandera bien ce que ce gigantesque M jaune représente... peu être un symbole religieux...


Homo Sapiens vous prendra dans son trip, dans ses images hypnotisantes, ces cadrages qui parlent d'eux même ou ce silence qui en dit plus que le plus professionnel des baratineurs. Alors évidement aucun film n'est parfait, et celui-ci ne déroge pas à la règle... son défaut est pour moi d'être trop court. Je voulais en voir plus, et puis dans la grande tradition des explorateurs urbains Nikolaus Geyrhalter ne dit pas où il fait ses images. Si certains lieux sont trop emblématiques pour être préservés du public, d'autres sont en revanche assez énigmatiques. Le jeu de la recherche de ces lieux sur le Web n'a pas été facile même si je les ai tous identifié. Je vous laisse les chercher vous même, vous découvrirez au passage de nombreux autres lieux tous aussi époustouflants les uns que les autres.


Que vous soyez sensible ou pas à ce film, il vous plaira quoi qu'il arrive. Il montre la grandeur et la décadence dont peut faire preuve l'humain au travers de vestiges ayant chacun leur singularité. Il vous donnera l'envie de découvrir le monde autrement que par les "all included" des usines à touristes qui deviendront elles même un jour des vestiges oubliés de tous. Alors après ce film s'il ne vous vient pas l'envie de vous précipiter à la station de métro Molitor à Paris c'est vraiment que vous n'avez pas de cœur !

Dr_Wily
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le 22 sept. 2017

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Dr. Wily

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