Un documentaire serbe archi-passéiste composé d'entretiens avec des pontes de l'industrie cinématographique yougoslave sous Tito ainsi que le projectionniste particulier du leader de la Yougoslavie alternativement coupé d'extraits de films de l'époque. Le contrat qui repose sur la découverte et l'approche historique du cinéma yougoslave qui me poussait à voir ce documentaire n'est pas vraiment rempli : les extraits s'intègrent mal au récit, l'information est lacunaire, et jamais le film ne cherche à dégager des thèmes ou des obsessions propres au cinéma yougoslave. Pire, il le met dans une position de subordination bête au pouvoir politique sans jamais lui donner la moindre vigueur.

Le regard repose non pas sur le contenu du cinéma yougoslave et c'est assez regrettable mais sur l'industrie cinématographique et ses rapports étroits avec le pouvoir politique. Le film s'appesantit longuement sur la figure paternelle de Tito, cinéphile confirmé, et une fascination sincère se dégage de sa représentation. La partie la plus réussie du film n'a paradoxalement aucun rapport avec le média. C'est la nostalgie profonde que distille l'ensemble qui emporte le morceau en fin de compte. Nostalgie de la Grande Yougoslavie de Tito (ici véritablement montré en héros salvateur refusant de se plier à Staline, admiré des acteurs européens et américains, aimé de son peuple ...). Il est là le passéisme dont je parlais au début de la critique. Mais on ne pourra pas dire qu'on était pas prévenus puisque dans les premières minutes du film, sous une musique mélancolique, un carton s'affiche : "Ce film parle d'un pays qui n'existe plus, sauf dans ce film ...".

Au niveau du contenu du documentaire, c'est assez inégal. Je regrette vraiment comme je le disais que le cinéma en tant qu'art, en tant que culture, n'intéresse absolument pas le documentariste. C'est l'industrie du cinéma dont il est fait l'apologie ici, de la naissance à la chute des studios yougoslaves. Même quand le documentaire s'attarde sur les films, il ne fait que dérouler des anecdotes de tournage d'inégal intérêt. Il y est déblatéré en long, en large et en travers sur la Bataille de la Neretva, jamais sur le film en lui-même, mais sur la façon dont il a été conçu, produit, l'importance qu'il a eu pour le prestige et le rayonnement culturel de la Yougoslavie à l'époque. Ce n'est pas inintéressant, d'autant que certaines révélations surprennent réellement, mais c'est limité.

En bref, film un peu superficiel qui loupe le coche naturel qui lui était tendu : l'analyse historique du cinéma yougoslave. Il se rattrape toutefois dans le passéisme convaincu dont il fait preuve et la glorification sincère et émouvante de Tito qui est assez rare dans le cinéma contemporain pour être signalée :-)
Nwazayte
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le 12 mars 2014

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