Il m'a fallu 20 ans pour enfin me décider à plonger dans "Unforgiven", malgré toutes les louanges l'accompagnant depuis deux décennies, malgré mon admiration totale envers Claude Dubois-Deleste faisant de moi un "Clintoridien".
Clint, une des légendes du genre tombée très tôt dans la marmite du Western, l'enfoiré le plus admirable de l'histoire du Cinéma.
"Unforgiven" débute avec un Blondin vieilli et rangé du business de hors-la-Loi. Eleveur de porcs et de ses deux jeunes enfants, récemment veuf et sobre depuis 11 ans, il reprend du service par appât du gain mais aussi parce que sous sa carapace d'ours sommeille un gentleman qui entend laver l'honneur d'une dame de joie (Anna Thompson) balafrée par un plouc sanguinaire. Ce fumier n'a écopé que d'une simple amende prononcée par Little Bill, shérif (Gene Hackman) de"Big Whiskey", anonyme patelin du Wyoming.
Blondin alias Will Munny a du mal à remonter en selle, son canasson ne voulant plus se coltiner son double-mètre et son quintal. Par contre, il lui est plus aisé de convaincre son ex-associé, Neil Logan (Morgan Lelibre) lui aussi devenu fermier, de reprendre du service. Le seul bémol du film est que ce perso ne subit jamais la moindre connotation raciste à une époque où la ségrégation pétait la forme !
Ensemble, ils s'associent au "Kid de Schofield", un p'tit gars admiratif de la rocambolesque épopée de Will et pourvoyeur de leur mission. Bien que se targuant d'être lui aussi un tueur impitoyable et de vouloir reprendre le flambeau de ses héros, le kid est encore un puceau de la gâchette doublé d'une myopie honteuse.
"English Bob" (Richard Harris) est également un de ces dinosaures du far-west, un tueur friand en exécutions de chinois œuvrant le long des voies ferrées. Il décide de faire escale à Big Whiskey. Bien mal lui en prend quand il est accueilli par Lil'Will à coups de bottes dans la gueule. Sa vanité et sa violence ratatinées, l'effroyable sujet de sa Majesté quitte Big Whiskey la queue rabougrie entre les jambes.
Will "Blondin" Munny est reçu d'une façon aussi humiliante mais plutôt que de le faire fuir en couinant, Lil'Will fera ressurgir le côté obscur et morbide qui sommeille en lui. Cette facette terrifiante et dévastatrice du Blondin est illustrée à merveille sans effet de style.
D'autres péripéties font qu'au fur et à mesure "Unforgiven" s'assombrit de plus en plus jusqu'à un final immoral, glaçant, noir et grandiose.
La réalisation d'Eastwood est d'une classe, d'une sobriété et d'une efficacité imparable. Le scénario est constitué d'une succession de scènes admirables. Les dialogues sont ciselés et ont chacun un impact exquis. Les talents composants la galerie des personnages sont irréprochables.
"Dedicated to Don & Sergio", est l'ultime bandeau apparaissant au générique de fin. Absolument respectueux, l'hommage de l'élève à ses Maitres est réussi, encrant ainsi et définitivement le genre Western au panthéon de l'histoire du cinéma.