Tony Stark dans les griffes du Mandarin

Après un premier opus réussi qui eut le grand mérite de populariser un héros Marvel quelque peu méconnu par chez nous et suite au marasme artistique que fut le second film, Iron Man 3 change donc de réalisateur. Exit Jon Favreau et ses emprunts évidents à Robocop 2, l'acteur-réalisateur conservant néanmoins ici le poste de producteur associé et le rôle de Happy, le fidèle garde du corps du héros, qui se voit d'ailleurs gratifié d'un temps de présence plus important à l'écran dans la première partie du film (avant d'être littéralement bazardé par le scénar).


A Shane Black d'écrire et de mettre en scène les nouvelles aventures de l'homme de fer dans un opus dont l'intrigue se situe clairement après les événements de New York relaté dans le premier Avengers (en parfaite cohérence avec cette volonté de Marvel d'unifier les univers de chacun de ses héros en entamant ici la phase 2). Et force est de constater que l'on retrouve bien ici la patte scénaristique du créateur de L'Arme fatale, ne serait-ce que par son humour féroce et ses répliques percutantes (la scène des deux gardiens que Stark menace en vain de représailles m'a bien fait rire, ça m'a rappelé Obélix dans Astérix et Cléopâtre : "Attention, on sort !").


Black, dont c'est seulement le second film en tant que réalisateur et qui avait auparavant dirigé (et ressuscité la carrière de) Robert Downey Jr dans son excellent buddy movie Kiss Kiss Bang Bang y fait preuve d'un étonnant savoir-faire en matière de mise en scène, nous livrant quelques morceaux de bravoure mémorables dont la fameuse attaque héliportée et le sauvetage à priori impossible de 13 personnes en chute libre. Certes, on n'est pas encore au niveau d'un Whedon et moins encore d'un Snyder, mais il faut au moins reconnaître que le gonze n'a clairement rien à envier à son prédécesseur, d'autant qu'il s'appuie ici sur un casting solide composé évidemment de Downey Jr, de Gwyneth Paltrow mais aussi du sous-estimé Guy Pearce (qui ne trouve cependant pas ici un rôle à sa mesure) et de Sir Ben Kingsley


dont on appréciera l'ambivalence de sa composition d'un Mandarin de pacotille, homme de paille d'un bad guy bien plus redoutable.


A priori donc, Iron Man 3 a tout d'une parfaite réussite dans le genre, vengeant les fans d'un affligeant second opus qui désacralisait de manière un peu trop prononcée (un petit pipi dans l'armure) l'image d'un super-héros que Shane Black désacralise pourtant également mais de façon à priori bien plus subtile en le privant temporairement de ses moyens et de son armure. On reconnaît bien là le style de Black, cette déchéance du héros laquelle s'accompagne toujours des réminiscences d'un épisode traumatique (en général la mort d'un proche) pour justifier sa trajectoire dramatique. Ici, c'est la brève incursion de Stark dans une autre dimension lors du climax d'Avengers qui sert à Black de trauma nécessaire pour expliquer les tourments égocentriques d'un anti-héros souffrant de soudaines crises d'angoisses aussi crédibles que son armure volante (en ce sens Tony Stark n'est définitivement pas Tony Soprano).


Du coup, Tony Stark détonne cruellement avec les précédents "héros" de Shane Black, lesquels s'imposaient pour la plupart comme de véritables modèles dramatiques en quête de rédemption. Qui plus est, le cynisme prononcé du personnage empêche la moindre identification du spectateur (du moins c'est mon cas) et l'on se prend presque à ricaner au moins autant que Killian face au calvaire d'un personnage dont l'héroïsme est proportionnel à l'égoïsme. ("Je l'aurai sauvé moi.").


C'est surtout dans le traitement que Shane Black impose à ce personnage que le film échoue à être plus qu'un honnête divertissement. Ce qui marchait pour Riggs, Hallenbeck, Slater and co n'est plus vraiment applicable à un personnage tel que Stark. Shane Black aura beau lui flanquer tout un tas d'équipiers évoquant les Roger Murtaugh et les Danny Madigan de l'époque, ils n'en resteront pas moins que de vulgaires ressorts scénaristiques, à peine développés et donc sans le moindre intérêt.


Reste de bonnes idées, parfois à double tranchant, comme le fait de démultiplier les alter-egos métalliques de Stark au point qu'on finit presque par se demander si le marionnettiste qui les contrôle ne serait pas lui-même interchangeable. Ce à quoi Black nous répond à travers cette ultime réplique assénée en voix-off par Stark au spectateur "Je suis Iron Man !", laquelle fait bien sûr écho à l'ultime réplique du premier volet. Reste cette question : celui qui la prononce a-t-il au moins évolué entre ces deux conclusions ? Et Banner de nous asséner sa réponse post-générique.

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le 30 août 2015

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Buddy_Noone

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