S’ouvrant de manière efficace, sur une jeune femme terrorisée courant à travers un quartier résidentiel en plan séquence, It Follows impose dès lors un rythme haletant. La caméra suit – littéralement – l’héroïne et préfigure d’un film poursuite qui risque probablement d’être intense. Pourtant ce n’est pas le cas, et si l’idée de bousculer la première idée qu’on se fait du projet est une bonne chose en soi, il en convient autrement quand le film de David Robert Mitchell devient une sorte de melting-pot mal digéré des classiques du genre, le tout agrémenté d’une morale totalement nauséabonde. Partant du constat que dès lors qu’un ou une adolescente fasse l’amour celui ou celle-ci se retrouve pourchassé par une figure fantomatique vengeresse, It Follows nous propose ici une sorte de métaphore sur le passage à l’âge adulte, un pont qui se révèle apparemment difficile à traverser pour les personnages. Mais si cette thématique est bien présente, elle se trouve vite étouffée par une autre que le film semble constamment nous marteler : l’abstinence. Et quoi de mieux qu’un film d’horreur pour faire passer le message insidieux qu’une vie de débauche ou en dehors du mariage n’est promesse que de malheurs, voire de mort ? Obnubilé par cette idée, le réalisateur ne peut s’empêcher sans cesse de placer des symboles, de nous rappeler ô combien il est important qu’une jeune femme se préserve si elle ne veut pas se faire violer un soir de rendez-vous galant. On se demande bien ce qui est passé par la tête du cinéaste, apparemment plus occupé à juger ses personnages (jusqu’à porter un jugement envers les prostituées absolument innommable) qu’à créer une réelle tension.


La mauvaise idée d’It Follows se situe également dans le fait qu’il nous révèle au bout de vingt petites minutes ses aboutissants. Nous savons à quoi ressemble le « monstre », et il ne reste alors plus aucun intérêt à regarder cette suite de scènes sans logique, qui semblent se baser sur trois ou quatre effets de mise en scène en tout et pour tout. Une réalisation léchée qui n’en a que le nom car elle ne possède aucun attrait visuel, ce qui ne finit que d’appuyer sur le côté extrêmement prévisible et poussif du récit, conçu comme un Paranormal Activity. A cela s’ajoute malheureusement une bande-son des plus médiocre, sorte de mix entre Drive et un bon vieux film de Carpenter, mais qui donne nettement plus le sentiment que le compositeur s’est endormi sur le clavier, probablement terrassé par le rythme bateau du long-métrage. Voilà ce qu’est It Follows, une sorte de longue morale bête et méchante maquillée sous des tonnes d’artifices et de références afin de nous prouver sa valeur artistique, quand il n’est qu’un navet inutilement glorifié.

Florian_Bodin
2
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Année 2015 - Cinéma, Le pire du cinéma en 2015 et Flop 2015 - Cinéma

Créée

le 11 août 2015

Critique lue 353 fois

2 j'aime

Florian Bodin

Écrit par

Critique lue 353 fois

2

D'autres avis sur It Follows

It Follows
Kogepan
8

Miii ._. (ou : les aventures d'une souris devant un film d'horreur)

Je ne regarde pas beaucoup de films d'horreur. J'ai les bases, j'aime bien occasionnellement me poser devant un bon gros film terrifiant avec une bière, un coussin (très important, le coussin) et mon...

le 11 févr. 2015

134 j'aime

9

It Follows
Velvetman
8

Only monster forgives

Où sommes-nous ? Ce bruit assourdissant, dissonant, qui nous parvient à la vue de ce quartier pavillonnaire tout droit sorti de Blue Velvet ou Donnie Darko. Une jeune adolescente peu vêtue sort de...

le 5 févr. 2015

117 j'aime

8

It Follows
Sergent_Pepper
7

Suivre et survivre

C’est sur un éblouissement propre à séduire le cinéphile peu connaisseur du genre que s’ouvre It Follows : une superbe leçon de mise en scène. Le plan séquence initial, tout en lenteur circulaire,...

le 15 juin 2015

115 j'aime

11

Du même critique

A Ghost Story
Florian_Bodin
10

Laisser sa trace

A lire sur Cinématraque Nous avons tous perdu l’être aimé, dans la mort ou dans la rupture. Quand un couple se divise, ce n’est pas simplement une relation qui s’arrête, mais tout ce qu’elle a...

le 4 sept. 2017

22 j'aime

6

Monuments Men
Florian_Bodin
4

Art mineur

Depuis plus de cinquante ans, les films sur la guerre sont présents dans l'histoire du cinéma. Justement parce qu'ils servent, en général, à juger, critiquer, remettre dans un contexte ou même...

le 12 mars 2014

22 j'aime

Vanilla Sky
Florian_Bodin
9

The little things

Ce n’est pas si souvent qu’un remake soit pertinent et intelligent. Et qu’il soit en plus si bien pensé qu’il arrive à rester encore dans un coin de notre esprit quelques jours après le visionnage...

le 29 janv. 2014

19 j'aime

1