Rarement un film n'avait si bien porté son nom.
J'en ressort tout juste, et ce que j'ai vu m'a profondément retourné. "J'ai rencontré le diable", c'est finalement une histoire de vengeance relativement classique. Une pauvre jeune femme se fait sauvagement assassiner, et son fiancé va tout faire pour faire payer cet acte au meurtrier.
C'est là où ça se corse. Au fur et à mesure du film, on sombre dans la démence et le sadisme le plus absolu. Le héros, interprété par un Lee Byung-Hun phénoménal (qui avait déjà impressionné par sa présence et son charisme dans "A Bittersweet Life", du même réal) se met en tête de faire souffrir le meurtrier autant que sa fiancée. Une chasse morbide et violente se met alors en place. Le héros véritablement habité par la haine et la vengeance, perd la moindre parcelle de compassion au contact du monstre qu'il traque, qui mérite amplement son titre de diable.
Dès les premières minutes du film, on ressent un profond dégoût pour ce dernier, archétype du tueur psychotique, qui n'a d'humain que l'apparence. On espère à ce moment du film qu'il va payer pour ses crimes, et c'est ce qui va se passer par la suite, dans des proportions inimaginables. Le film nous ballade entre plusieurs émotions : la compassion, la haine, le dégoût, et parfois même la frustration devant l'absurdité d'un héros perdu dans son délire vengeur.
Comme dans les précédents films de Kim Jee-Woon, et en particulier "A Bittersweet Life", la violence est omniprésente. Mise en scène sans aucun artifice et représenté de façon crue, froide et réaliste, elle en devient presque insoutenable. On pourrait même reprocher au film de donner dans la surenchère et le sang gratuit à certains moments. Comme souvent avec les films d'origine coréenne, la réalisation est impeccable et nous montre l'horreur avec moult détails.
Le choix des acteurs est un gros point fort du film. Époustouflant dans leur jeu d'acteur, le duo principal porte le film à bout de bras. Alors que Lee Byung-Hun incarne ici Soo-hyun, le vengeur éploré, il incarnait dans "A bittersweet life" un autre vengeur, cette fois sorti de terre et bien décidé à faire payer dans le sang les responsables de sa presque mort. On peut dire qu'il reste dans son registre avec "J'ai rencontré le diable".
De manière différente, beaucoup auront reconnus sous les traits du monstrueux Kyung-Chul le très talentueux Choi Min-Sik. Ce dernier avait précédemment incarné un homme assoiffé de vengeance dans l'excellent "Old Boy" ...
Le film se termine par un long travelling qui restera dans les mémoires. Soo-hyun a rencontré le diable, mais il ne s'attendait pas à ce qu'il soit enfoui au plus profond de lui.
J'ai rencontré le diable n'invente rien. Le film reprend une trame très classique en matière de thriller, et cède même parfois à la caricature. L'ultra violence est plus que présente, à en devenir presque ridicule. Mais les qualités esthétiques du film et la réalisation, tout comme la façon dont est traité le propos, et surtout la rencontre entre deux des plus talentueux acteurs du cinéma coréen suffisent amplement à justifier le visionnage.
Kim Jee-Woon nous livre une petite pépite en provenance de Corée, et une nouvelle histoire de vengeance pleine de massacre et de sang, encore plus viscéral et traumatisante que son précédent film.