Je ne regrette rien de ma jeunesse - L'un des premiers Kurosawa

Réalisé en 1946, "Je ne regrette rien de ma jeunesse" raconte l’histoire de Yukie, fille d’un professeur d’université, interprétée par Setsuko Hara, sur fond de militarisation du Japon dans les années 30 et de seconde guerre mondiale.


A bien des égards, ce film constitue une réponse aux premiers films de Kurosawa, qualifiés de propagande, alors que l’archipel est occupé par les troupes américaines. Le film aborde les évènements de l’Université de Kyoto qui ont conduit à un bras de fer entre les étudiants de l’université, qui s’opposent à la purge de certains professeurs jugés trop libéraux ou à gauche par le régime, et l’armée qui prend progressivement le contrôle du pays. Après plusieurs semaines de conflit, les militaires font arrêter les meneurs tandis que les étudiants et le corps professoral abandonnent la lutte.


Cependant, Kurosawa choisit de traiter cette période à travers le personnage de Yukie, fille de l’un des professeurs écartés, qui est amoureuse de l’un des meneurs du mouvement : Noge. En 1941, elle le retrouve à Tokyo alors qu’il est à la tête d’un organisme d’experts économiques pour l’armée japonaise : une couverture alors qu'il est à la tête d’un réseau de résistance qui œuvre pour empêcher la guerre contre les Etats-Unis.


Le rôle de Yukie ainsi que sa conscience politique grandissent avec la progression du récit. Alors qu’elle n’était au début qu’une jeune fille frivole peu encline à s’occuper de politique, elle finit par prendre soin des pauvres villageois et promeut la culture dans les campagnes. Elle représente la figure d’un Japon modernisateur opposé aux conceptions traditionnalistes des anciens dirigeants.


La rigeur morale de Yukie et Noge est d’autant plus frappante que le film dresse un parallèle avec le personnage d’Itokawa, ancien élève du père de Yukie et membre du mouvement étudiant devenu procureur après ses études. Figure du renoncement voire d’une certaine forme de lâchete face aux pressions politiques, Itokawa est l’autre prétendant de Yukie et lui propose la stabilité alors qu'elle choisit de vivre sans regrets avec Noge.


Néanmoins, la richesse du sujet ne saurait cacher les défauts du film: un certain manque de rythme, des longueurs et une maitrise de la caméra qui n’est pas encore celle du grand maître que deviendra Kurosawa.


En conclusion, il s’agit d’un film intéressant par son sujet (la militarisation du Japon et la résistance intérieure) mais qui reste mineur dans la filmographie de Kurosawa.

FumaEtienne
6
Écrit par

Créée

le 28 avr. 2016

Critique lue 324 fois

1 j'aime

FumaEtienne

Écrit par

Critique lue 324 fois

1

D'autres avis sur Je ne regrette rien de ma jeunesse

Je ne regrette rien de ma jeunesse
Grimault_
8

Liberté diluvienne

Tokyo 1933. Les fascistes sont en pleine chasse à l’homme, persécutant les professeurs libéraux et les élèves qui les soutiennent en manifestant pour la liberté. Yukie, jeune fille fougueuse et...

le 20 juin 2018

24 j'aime

11

Je ne regrette rien de ma jeunesse
Kobayashhi
7

Un Kurosawa décomplexé, ça envoi du lourd !

Je ne regrette pas ma jeunesse, ( hum en commençant par cette phrase, on dirait que j'écris mes mémoires ) est réalisé un an après la fin de la seconde guerre mondiale. En général, j'essaie d'avoir...

le 16 août 2013

17 j'aime

Je ne regrette rien de ma jeunesse
abscondita
7

" Je veux vérifier par moi-même ce que vivre veut dire."

Dans ce film tourné au lendemain de la seconde guerre mondiale, Kurosawa critique le régime japonais fasciste d’avant guerre, sa volonté expansionniste et sa répression des libertés. Il s’inspire de...

le 21 oct. 2022

13 j'aime

9

Du même critique

Je ne regrette rien de ma jeunesse
FumaEtienne
6

Je ne regrette rien de ma jeunesse - L'un des premiers Kurosawa

Réalisé en 1946, "Je ne regrette rien de ma jeunesse" raconte l’histoire de Yukie, fille d’un professeur d’université, interprétée par Setsuko Hara, sur fond de militarisation du Japon dans les...

le 28 avr. 2016

1 j'aime