Depuis 2014, la loi française permet la rencontre encadrée entre victimes et criminels afin de nouer un dialogue réparateur. Pour beaucoup, la sanction carcérale ne suffit ni à apaiser les traumatismes ni ne permet aux repris de justice de saisir l’ampleur de leurs actes passés. C’est ce qui pousse Leïla Bekhti, Gilles Lellouche et Miou-Miou, victimes d’agressions, à venir discuter pendant cinq semaines dans les murs d’une prison avec Birane Ba, Dali Benssalah et Fred Testot, tous trois condamnés pour d’autres infractions violentes. En parallèle, les bénévoles qui mettent en place ces rencontres réparatrices tentent de réunir Adèle Exarchopoulos, interprète d’une victime de violences sexuelles incestueuses, et son agresseur déjà sorti de prison, joué par Raphaël Quenard. Dans un double face-à-face théâtral, les immenses acteurs et actrices s’évertuent à comprendre les ressorts du crime, de la peur et de la reconstruction pour aller de l’avant. La mise en scène confrontationnelle et tranchée, au service d’un didactisme omniprésent sans être étouffant, s’accorde parfaitement aux performances exceptionnelles de l’ensemble du casting. En plus d’une plongée dans le quotidien éprouvant psychologiquement pour les organisateurs, obligés de se protéger par un langage très artificiel, le dernier film de Jeanne Herry illustre avec force ce pan méconnu et novateur de la justice, que l’on qualifie de restaurative. Mais cette alternance constante entre le théâtre filmé, le drame intime et la volonté documentaire aboutit à un film profondément hybride et parfois naïf qui désincarne peu à peu ses personnages, statufiés collectivement en archétypes, témoins de la pluralité à la française.