Deux ans après le succès surprise de John Wick, Keanu Reeves (visiblement insensible aux ravages du temps) endosse à nouveau la défroque (enfin le costume) du tueur à gages de légende contraint à nouveau de sortir de sa retraite pour honorer une dette de sang et retrouve un des co-réalisateurs de l'original Chad Stahelski pour une suite qui promet plus d'action et plus de headshots. Mais parviendra t'elle à capturer à nouveau la magie ballistique de l'original ?


John Wick s'était distingué par son action incessante et graphique et si la trame du film était simple le scénariste Derek Kolstad (qui a donné au héros le nom de son grand-père) avait bâti en toile de fond un univers gravitant autour d'un mystérieux hôtel "The Continental", sanctuaire pour assassins (à la manière des lieux de culte dans Highlander dont Chad Stahelski va réaliser le remake) dirigé par le non-moins mystérieux Winston (Ian McShane) responsable d'une confrérie occulte régissant le monde criminel. Le développement de cette "mythologie" permet à John Wick 2 d'éviter le piège dans lequel tombent tant de suites : reproduire servilement la structure du premier volet pour en offrir un remake déguisé plus richement doté . L'introduction d'une instance internationale qui regroupe les grandes organisations criminelles la "Haute Table" permet d'étendre l'envergure de l'action et donne l'argument qui va pousser John Wick à reprendre du service. Santino D'Antonio (Riccardo Scamarcio) criminel parvenu va obliger Wick, tenu par une ancienne dette à exécuter sa propre sœur Gianna pour prendre sa place à la "Haute Table". Bien sur le contrat va mal tourner et notre anti-héros va devoir échapper à l'élite des tueurs de la planète.


Everybody was Gun fu fighting


Le film s'ouvre par un pré-générique à la James Bond qui montre John Wick régler un dernier détail de sa mission de vengeance, cette séquence d'action de 13 minutes déjà démentes véritable "car-fight" donne le ton du film. L'action se transporte ensuite à à Rome où après s’être équipé auprès d'un "sommelier" (Peter Serafinowicz vu dans Spy et les Gardiens de la Galaxie) - la encore petit clin d'œil bondien - les choses sérieuses vont commencer. Le déchaînement des calibres est précédé d'une scene trouble étonnamment gothique qui n'aurait pas dépareillé dans un film de Guillermo Del Toro, c'est justement le directeur de la photographie Dan Laustsen (Crimson Peak , Silent Hill) qui éclaire le film, optant pour des objectifs anamorphiques agrandissant le cadre lui conférant un aspect majestueux. La première fusillade a lieu au cours d'une fête donnée dans les thermes de Caracalla et semble de prime abord décalquer celle de la boite de nuit du premier opus, mais bien vite elle se transforme en une incroyable poursuite mortelle dans les catacombes nimbées d'obscurité qui voit Wick affronter pas moins de trente cinq (!) tueurs surgissant par vagues à la manière d'un jeu-vidéo.


L'intrigue de ce second volet fonctionne en miroir de celle du précédent, de chasseur John Wick devient la proie d'une variété d'assassins donnant à chaque scène d'action un cadre et des antagonistes spécifiques qui les rendent particulièrement efficaces. Les chorégraphies deviennent de plus en plus complexes et extravagantes, la violence du film rythmée par les pulsations agressives de la partition de Tyler Bates est aussi esthétique que brutale, la lumière tout en teintes métalliques et éclats de néon donnant à cet univers un aspect irréel presque "comic-book". Si les gunfights du premier volet pouvaient être comparés (dans une moindre mesure) à ceux de The Killer de John Woo le niveau insensé et proprement jubilatoire qu'atteignent ceux de John Wick 2 en font un sommet de l'action dans la veine de Hard Boiled. Si la confrontation finale du premier film constituait à nos yeux son talon d'Achille, pas à la hauteur de ce qui précédait, le climax de John Wick 2, hommage version 'Gun-fu' de celui d' Operation Dragon est pleinement satisfaisant et son dénouement si il laisse la porte ouvertes à de futurs chapitres, apporte une conclusion légendaire aux aventures de John Wick.


Les méchants et les méchants


L'antagoniste principal Santino D'Antonio constitue le point faible du film, interprété par l'acteur italien Riccardo Scamarcio il manque des nuances du méchant interprété par Michael Nyqvist dans le premier chapitre, fort heureusement il est entouré d'une galerie de personnages plus intéressants à l'image d' Arés sa responsable de la sécurité, muette, jouée par l'australienne Ruby Rose (Orange is the new Black, XXX Reactivated), de sa sœur Gianna (Claudia Gerini) une vénéneuse comtesse de la mafia semblant surgir d'un Mario Bava ou du garde du corps de cette dernière Cassian , interprété par le rappeur-comédien Common (Night Run , Terminator renaissance). Un assassin en tout point l'égal de John Wick qu'il affronte dans deux duels d'anthologie dans les rues de Rome ainsi que dans une station de métro New-Yorkaise. Le nouveau venu le plus marquant est bien sur le Bowery King un mystérieux criminel à la tête d'un réseau de clochards assassins (qui tient son titre d'un quartier de Manhattan qui à la réputation d'attirer les alcooliques et les SDF) interprété par Lawrence Fishburne qui possède encore l'autorité et la présence qui l'a rendu si mémorable en Morpheus dans Matrix. Voir ces deux acteurs partager à nouveau l'écran fait monter une bouffée de nostalgie pour cette fin des années 90 ou Matrix était le sommet du cool.


Masters of Gun-fu


John Wick 2 est un des rares films de pure action où celle-ci constitue non pas un simple élément mais le cœur du film, il faut saluer le travail exceptionnel du réalisateur Chad Stahelski et de son monteur Evan Schiff qui perfectionnent ici une véritable philosophie de l'action qu'ils veulent certes incessante et cinétique mais toujours lisible la laissant se développer dans de longues prises, en plans larges, sans coupes intempestives se reposant principalement sur les prouesses physiques des équipes de cascadeurs (Stahelski est lui même un ancien cascadeur qui a débuté sa carrière en doublant Keanu Reeves dans Matrix !) et l'implication de sa star. En effet les John Wick ne serait rien sans Keanu Reeves à nouveau impérial ici tout en charisme zen, qui parvient à donner à son ange exterminateur une humanité qui met toujours le public de son coté, son implication physique dans l'action (il s'est entraîné au tir , aux arts martiaux et à la conduite de précision), l'élégance de ses mouvements et sa manière d'utiliser ses armes comme des extensions de lui-même cimente le statut de John Wick comme le meilleur gunfighter cinématographique depuis Chow-yun fat.


Conclusion : John Wick 2 est un modèle parfait de suite "bigger and better" qui ne tombe pas dans le piège du décalque de l'original, si on y retrouve des éléments familiers le film étend sa mythologie et élève exponentiellement l'ampleur de ses scènes d'action qui atteignent ici un niveau stratosphérique. Suite Royale!

PatriceSteibel
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le 9 févr. 2017

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