Johnny Apollo
6.9
Johnny Apollo

Film de Henry Hathaway (1940)

Une intrigue comme on savait la faire dans les années 1930-1940, avec de vrais dilemmes moraux. Un noir et blanc réaliste, avec des touches d'expressionnisme dès qu'on touche à la prison. Des dialogues réussis, des interprétations fouillées, loin du star system hollywoodien habituel. Quelques numéros musicaux. Une violence tempérée par le Code Hayes (une femme frappée derrière un canapé, un meurtre dans un sauna suggéré, quasiment pas de sexe).

Robert Cain a un père millionnaire condamné pour escroquerie à 10 ans de prison. Désabusé, il se met à chercher du boulot, mais on est dans les années 1930, aux Etats-Unis. Amer, il comprend que les anciens amis de son père l'ont abandonné. Il prend le nom de Johnny Apollo et décide de s'allier avec un caïd de la pègre en déclin, Mick, qui est avec une poule au grand coeur, Lucky, et un vieux juge fan de Shakespeare. Le fils pardonne à son père, qui devient le prisonnier le plus aimé du pénitencier. Mais le père apprend la déchéance de son fils, et le renie. Entraîné dans la spirale du crime, Robert finit par être arrêté avec Mick, qui entretemps à fait assassiner le juge, prêt à le donner pour sauver Johnny Apollo. Père et fils se retrouvent au pénitencier. Johnny se trouve mêlé à une tentative d'évasion qui tourne mal, mais son père parvient à le blanchir. Dans un happy ending particulièrement artificiel, le père le fils et Lucky partent en souriant du pénitencier.

Il y a beaucoup de belles séquences, qui doivent leur force à l'intensité dramatique et l'efficacité d'Hathaway. La scène la plus émouvante est probablement celle, centrale, où le père et le fils se pardonnent mutuellement au parloir et tentent de se serrer la main, mais se contentent de superposer leurs mains croisées sur le grillage. Les champs-contre-champs à travers le grillage, et l'insistance sur les lignes verticales du pénitencier, sans être originales, font leur effet. Si le film a quelques faiblesses au niveau du héros et du personnage féminin, dont on sent qu'Hathaway ne s'est pas foulé pour lui donner beaucoup d'épaisseur, les nombreux seconds rôles, bien croqués, donnent au film beaucoup de charme.

J'aime beaucoup la séquence où le juge sort de chez l'attorney après lui avoir refilé les preuves contre Mick qu'il avait dans une sacoche. On le voit descendre les marches du palais de justice, avec au premier plan la voiture où Mick l'attend, témoin de sa trahison. Mick l'accoste, glisse son doigt dans la sacoche vide, et dit simplement "I'll be seeing you". La voiture démarre. Le juge reste un peu coi en la regardant s'éloigner, puis regarde la sacoche, la jète de manière dérisoire dans le caniveau, au milieu des passants, et part avec sa démarche "je-suis-condamné-mais-je-m'en-fous".

Un bon film noir, dont on regrettera qu'il ait été bridé par la censure. La description de la pègre est assez édulcorée, malgré un début sur les chapeaux de roues.

Vu à la Cinémathèque, merci à la sweet Jane de m'avoir motivé à sortir.
zardoz6704
7
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le 31 janv. 2014

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