47 ans. Judy Garland avait 47 ans quand elle s’est éteinte le 22 juin 1969. Née le 10 juin 1922, elle deviendra la nouvelle étoile du cinéma à seulement 17 ans, grâce au succès de "Le magicien d’Oz" après s’être distinguée deux ans plus tôt dans "The Broadway Melody of 1938", film dans lequel elle chante « Dear Mr. Gable, you made me love you » devant une photographie de Clark Gable.
Mais ce n’est pas aux premiers pas de l’actrice et chanteuse que "Judy" s’intéresse, mais plutôt à la fin de sa carrière, au moment même où elle est en délicatesse avec elle-même, tant professionnellement que personnellement. Un moment clé qui menace de la plonger encore davantage dans les profondeurs d’une vie compliquée. Malgré les réticences quelque peu claquantes de Liza Minnelli quant à ce biopic sur sa mère, c’est bel et bien sur l’année 1968 que se penche le film, trouvant sa source d’inspiration sur la comédie musicale "End of the rainbow" et sur les témoignages précieux de Rosalyn Wilder.
Une chose est sûre, s’il y a bien une personne que je n’attendais pas dans le rôle-titre, c’est bien Renée Zellweger. Non pas parce qu’elle n’avait pas fait ses preuves dans ce genre de film ("Chicago" est là pour en attester), mais parce que le physique est fondamentalement différent. L’actrice est blonde et s’est souvent servie de sa couleur de cheveux pour jouer les blondes un peu cruches et naïves (notamment pour le rôle de Bridget Jones), Judy Garland est brune. Jusque-là, rien d’insurmontable. La comédienne est potelée, bien en chair, Judy Garland est plus élancée. Eh bien mes amis, Renée Zellweger est pour ainsi dire méconnaissable. Les spectateurs la reconnaîtront quand même par les mimiques qu’on lui connaît et qui la rendent unique. Mais est-ce que ces mimiques vont dans le sens de l’interprétation ? En toute honnêteté je suis dans l’incapacité de répondre à cette question, mais toujours est-il qu’elle a su les limiter et les mettre au service d’un personnage mythique pourtant menacé d’une bascule dans un tourbillon de tourments sans fin. Est-ce qu’elle mérite son Oscar ? Là aussi je ne saurai répondre, Garland n’étant pas de ma génération et les images relatives aux apparitions de la star étant plus rarement diffusées en France que par exemple… Edith Piaf.
Le fait est qu’on y croit. Renée Zellweger réussit à rendre son personnage à la fois sympathique et rebelle à la fois. Est-ce là la vérité ? Là non plus je n’en sais rien. Mais alors si je ne sais rien de rien, ce qui semble être le cas, pourquoi donc j’écris ce papier ? Eh bien simplement pour vous dire que nous avons là un biopic simple, sobre, efficace. Un biopic tout ce qu’il y a de plus classique, quoi. Un biopic qui se regarde, ou tout du moins qui se laisse regarder.
Ça, c’était ce que je pensais jusqu’à la chanson finale. Une chanson finale qui enfin fera frémir d’émotion les spectateurs. Cette chanson finale qui constitue la cerise sur le gâteau. Cette chanson finale qui comble de bonheur, jusqu’au possible versement d’une petite larme d'émotion tant cette scène est magnifique et qui me fait donner le titre à cet avis. La chanson finale qui a peut-être fini de convaincre le jury de la 92ème cérémonie des Oscars. Et celui des Bafta Awards.
Il faut reconnaître que le travail de l’actrice est monumental : des cours de chant reçus pendant plus d’un an, lesquels lui ont permis de chanter les chansons (eh oui, c’est l’actrice elle-même qui nous fait profiter de son joli timbre de voix), l’étude de Judy Garland sous toutes les coutures pour reproduire les intonations, la gestuelle, l’accent… Qu’on apprécie ou pas ce biopic, je crois qu’on ne peut que s’incliner devant le travail fourni. Comme quoi, être acteur de cinéma n’est pas aussi simple qu’on pourrait le croire. Renée Zellweger illumine l’écran, occupe l’écran en permanence, y compris quand la caméra n’est pas braquée dessus.
Malgré cette présence de tous les instants, les rôles secondaires parviennent à exister. Je pense notamment à Finn Wittrock dans la peau de Mickey Deans dont on ne sait pas vraiment au final s’il était néfaste ou bénéfique à Judy Garland. Je pense aussi Jessie Buckley dans la peau de Rosalyn Wilder, car elle retranscrit à merveille tout ce que le public peut ressentir envers Judy Garland. Je pense également à Royce Pierreson dans les traits de Burt Rhodes, ce musicien à la fois heureux et craintif de travailler avec Judy. Je n’oublie pas non plus Rufus Sewell en ex-mari de Judy, dont on ne sait pas vraiment s’il représente une menace pour son ex-femme ou s’il veut vraiment protéger leur progéniture, ou... les deux à la fois. Il faut citer aussi Richard Cordery dans la peau de Louis B. Mayer, et qui apparait ici comme un terrible chef d’entreprise, celui-là même qui a construit et révélé au monde entier la Judy Garland, encore toute jeune et jouée ici par la jeune Darcy Shaw.
En effet, le biopic ne s’attarde pas seulement sur l’année 68 ; le récit se voit aéré d’une alternance avec les débuts de la star, ce qui permet de mieux comprendre et de mieux appréhender la psychologie de la star : il était une fois un rêve pour lequel bien des sacrifices ont été accomplis, puis l’aboutissement de ce rêve accompagné de conséquences physiques et morales.
En conclusion : un biopic solide, peut-être pas le meilleur que j’ai vu, mais doté d’un final somptueux et qui vaut le détour pour la prestation éblouissante de Renée Zellweger.

Stephenballade
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le 10 mars 2020

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