!!! ATTENTION SPOILERS !!!



Jurassic World est un film qui raconte sa propre histoire.


Celle d'une bande de fans allumés du citron, qui relèvent le défi courageux de remettre au goût du jour le chef d'oeuvre culte de Spielberg datant d'il y a plus de vingt ans. Le pari ? Impressionner d'Hollywood tout en répondant aux attentes de leurs pauvres victimes - nous autres, cinéphiles pétris de nostalgie de la période fin 80/début 90.


Dans un premier temps, le film se contente de faire du neuf avec du vieux: ça grouille d'hommages et de clins d'œil, à commencer par la reprise du fameux thème de John Williams dès l'arrivée dans le parc (fan-service, bonjour !). Mais, lorsque que les dinosaures apparaissent à l'écran, le feeling n'est clairement pas le même qu'autrefois. On ne ressent ni magie, ni surprise, la faute entre-autres à des effets spéciaux de qualité bien inférieures au niveau d'ambition du projet. Toutefois, quand on y réfléchit, peut-être est-ce justement là le message que cherchent à faire passer les créateurs du film : les dinos, c'est dépassé ! Il faut du nouveau, du "wahoo" comme dirait l'autre rouquine. Qu'à cela ne tienne, Henry Wu et son équipe rappliquent avec une solution de taille : l'Indominus Rex, aussi laid que son nom.


Malgré sa taille imposante, son intelligence au dessus de la moyenne et quelques capacités génétiques ouatezephoquesques,


Notamment l'art du camouflage. Si, si.


On ne peut pas dire que le bestiau inspire l'effroi ou la terreur auxquels on s'attendait. Certes, il est un peu punk sur les bords et passe ses journées à trucider humains et collègues sauriens pour le plaisir, mais il manque quelque chose dans son traitement pour en faire une véritable menace. Et puis franchement, cette tronche d'iguane albinos à la mâchoire encore plus élastique que le pénis d'un canard en rut m'a fait plus pitié qu'autre chose... Même le vil Spinosaure du très controversé Jurassic Park III avait plus de gueule à côté, nous y reviendrons.


Du côté des Homo Sapiens, la vedette se partage entre Chris Pratt, le dresseur de raptors ultra beau gosse, et Bryce Dallas Howard, l'organisatrice terre-à-terre finissant malgré elle par courir en talons dans une jungle et shooter des ptérosaures au fusil tranquillisant (personnage le plus intéressant à mon goût). Pour le reste, c'est du minimaliste et du réchauffé en masse : Vincent d'Onofrio campe un stéréotype de militaire grassouillet ayant la folie des grandeurs, Irfan Khan s'amuse plus à jouer à Supercopter qu'à diriger son parc, Omar Sy reste cool même si sa reconversion d'aide aux invalides à aide au dressage de raptors ne le crédibilise pas beaucoup... reste le geek/fanboy sympathique, dont on se prendra volontiers d'affection lorsqu'il se prend un râteau monumental avec la gourdasse de service. Quant aux deux gamins je préfère les oublier, de même que leurs parents (envoyer ses gosses dans l'endroit le plus dangereux du monde pour mieux régler le divorce devrait être classé dans le guinness book des pires parents du monde, sérieusement).


Niveau ambiance, c'est beaucoup trop sage et propre. A côté de son illustre aîné, qui provoquait sans peine frissons et adrénaline avec un peu de sang et de gadoue, Jurassic World s'empêtre dans un piètre statut de blockbuster aseptisé : pas la moindre goutte d'hémoglobine, aucun décès qui n'émeut un minimum,


Sauf peut-être le sort atroce qui frappe la pauvre baby-sitter


Mais surtout pas un seul instant on ne tremble pour nos héros. Je pense notamment à la scène où les gamins se font attaquer dans leur bulle de verre par ce jeune délinquant d'Indominus Rex (même Bruce dans Jaws faisait moins de dégâts que ça). A défaut d'égaler la cultissime séquence du T-Rex de 1993, ceci aurait du nous faire frissonner au un minimum. Et bien non, en fait la bestiole s'amuse juste à jouer à la pétanque avec la bubulle (tout en enquiquinant au passage une bande d'Ankylosaures pépères qui n'avaient rien demandé) et les mioches s'en tirent sans une seule égratignure en courant quelques mètres et en sautant dans une cascade... De même, la scène où, fraîchement libérés de leur volière, les Ptéranodons et leurs potes Dimophordons transforment le parc en apéro party et prennent les infortunés visiteurs pour des amuse-bec, ça aurait pu être un vrai massacre. Mais non, ça reste convenu, et au lieu d'un traumatisme on hérite d'un prétexte bidon pour rapprocher la rouquine et son rencard... Bref, tout cela manque fichtrement de sensations.


HEUREUSEMENT, quelques excellents arguments empêchent de peu la fermeture du parc.


Tout d'abord, cette idée aussi grotesque que couillue de transformer nos "amis" les raptors en fauves bien dressés ; inutile de rappeler à quel point on redoutait le pire rien qu'en voyant la bande-annonce... Et curieusement, ça passe pas si mal ! La relation entre Chris et les prédateurs marche bien et s'avère même plutôt kiffante. Même muselés, les reptiles paraissent aussi féroces et menaçants qu'au premier jour, se sortant bien mieux de l'infâme traitement numérique qu'ont subi leurs congénères. Chacune de leurs apparitions est une réussite, en particulier la fameuse traque nocturne de l'Indominus Rex où on les voit courir à côté de Chris juché sur sa moto, séquence qui aurait mérité un développement bien plus abouti soit dit en passant.


Le second as dans la manche de Jurassic World est incontestablement son final.


Vraie promesse du film, bien plus efficace que son fan-service et tous ses clins d'œil putassiers réunis, celui-ci révèle la nature finale de l'oeuvre : un plaisir coupable, aussi bourrin que bourré d'inepties totales (un gamin qui a réponse à tout, un raptor ex machina au ralenti, deux animaux préhistoriques se saluant d'un signe de tête...), mais incontestablement jouissif, surtout pendant 8 bonnes minutes de combat épique où les scénaristes se lâchent enfin et où le spectateur se dit qu'ils ont du se doper à la salive de Dilophosaure pour être sûrs de ne pas manquer leur coup.


Mais surtout, SURTOUT,


Il y a Rex...


Des yeux dans le noir, une torche fumigène rougeoyante, une silhouette imposante qui s'avance d'un pas lourd et menaçant, un rugissement emblématique... L'indétrônable monstre de cinéma renaît de ses cendres, portant sur son échine les derniers espoirs d'Isla Nublar et entendant bien montrer à ce jeune voyou d'Indominus qui en est le seul vrai roi. Le temps de quelques minutes seulement, Rex nous fait cadeau d'une dose de satisfaction suprême, un moment que l'on attendait tous depuis Jurassic Park III, où cet usurpateur de Spinosaurus lui avait outrageusement piqué son trône (comme pour citer mon estimé collègue, le bien nommé zombiraptor). Preuve étant avec les applaudissements de la salle, auxquels je me suis joint de tout cœur.


CONCLUSION


S'il peine à convaincre dans un premier temps - et surtout à s'émanciper du souvenir de son inégalable modèle -, Jurassic World remplit sa part du contrat dans ses dernières minutes et comble mes attentes avec brio. Il aura beau n'être au demeurant qu'un blockbuster/remake/reboot classique au fan service outrancier de plus, il n'en reste pas moins un divertissement honnête avec quelques superbes moments de bravoure qui gagnera indéniablement le cœur des plus nostalgiques d'entre vous, dont je n'ai pas honte de faire partie.


En témoigne ma note bien généreuse et subjective ("J'ai dépensé sans compter...").

reastweent
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le 15 juin 2015

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reastweent

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