Disclaimer : Je n'ai jamais lu un seul comics de la série "Kick-Ass", je critique donc les films sur la seule base de leurs contenus.
Pour moi, Kick-Ass premier du nom a toujours eu le cul entre deux chaises : pas complètement une parodie/pastiche de film de super-héros et pas complètement un film de super-héros. Le film de Vaughn était trop premier degré dans "l'émotion" (notez les guillemets), tandis que l'ironie et le cynisme loués par les critiques n'étaient que des rustines pour un script alignant les clichés super-héroïques, sous le faux prétexte de les détourner. En réalité, ces clichés étaient utilisés de la même façon qu'un autre film du genre : héros qui s'ignore, mentor qui décède, "get the girl", etc. S'il échouait à créer une forme de discours sur le statut du super-héros de comics/cinéma, au moins, le premier film s'avérait un divertissement correct, avec de bons dialogues et deux-trois idées de mise-en-scène pas dégueulasses (Vaughn étant un réalisateur plutôt doué, en témoignent "Layer Cake" et "Stardust").
Le problème principal de Kick-Ass 2 vient de son fond : on a affaire au même film que le premier, si bien que l'on a l'impression désagréable que Kick-Ass (Aaron T. Johnson) n'a jamais enfilé le costume tant il fait exactement les erreurs et a le même cheminement psychologique que dans le film précédent. On retrouve les mêmes séquences de passage à tabac, d'organisation de la team... que dans le film de Vaughn. De plus, le personnage de Jim Carrey, clone de Big Daddy/Nic Cage, est "useless as fuck", l'humour - à base de vomi/de blagues graveleuses - tombe à plat 9 fois sur dix et le scénario n'a aucun sens.
Le second gros problème de Kick-Ass 2 est sa forme : on a affaire au degré zéro de la mise-en-scène où chaque de scène de dialogues est un enchaînement aléatoire de champ/contre-champ et où chaque scène de baston est uniquement rythmée par le Parkinson dont semble être affligé le cameraman ainsi que par l'épilepsie chronique du montage (0.2 sec/plan, en moyenne). Bref, c'est vilain comme tout, ça pique les yeux et ça donne mal au crâne dès que ça bouge.
Ensuite, ses autres tares, en vrac : la direction artistique réussit le tour de force d'être d'une laideur sans nom tout en étant complètement générique, le scénario est d'une bêtise confondante (les tourments de HitGirl au lycée, pleaaaaase...); l'aspect "dramatique" ne fonctionne pas non plus car on ne s'intéresse pas aux personnages (trop génériques, trop clichés et surtout sans véritable épaisseur psychologique); le combat final se résume à des figurants ne sachant pas se battre et qui se tapent mollement dessus avec des accessoires en mousse (c'est le syndrome "Dark Knight Rises"); l'aspect référentiel à la culture "djeuns" est d'une lourdeur à pleurer (les mots "facebook" et "twitter" reviennent 6735 fois); et le côté méta/"self-conscious" est soit anéanti par l'humour concon et puéril du reste, soit n'a aucune consistance ("-On n'est pas dans un comics !", haaaaan koman c tro ozé).
Deux-trois réflexions avant de terminer :
- Quand on veut créer des ruptures de tons dans une histoire - style humour-bam-tristesse - il faut faire en sorte que 1) cela soit d'un intérêt quelconque pour l'histoire et 2) que les deux tons soient justes. Je sais, ça paraît bête de dire ça, mais c'est extrêmement difficile de trouver la justesse de ton dans une histoire - exactement comme en musique. Ici, on n'a absolument rien à foutre de la mort de *BIP*, de *BIIIP* et de *BIIIIIIP* puisqu'ils sont à peine développés par l'histoire.
- Les citations de pop-culture ne sont pas une déclaration d'intention ou une façon de revendiquer son appartenance au "milieu geek" (erk, cette expression).
- Foutre des cartons "Pendant ce temps" ou "Ailleurs" façon BD à li'mage ne suffit pas pour pouvoir se targuer d'être une adaptation de comics, encore moins une réussie. Surtout quand la mise-en-scène n'est en rien marquée ou pensée de cette façon : un film ne se fait pas comme une BD, les règles sont différentes, l'émotion ne passe de la même façon et ce qui peut être accepté par un lecteur de BD peut ne pas l'être par un spectateur (et vice-versa).
Un peu de name-dropping pour conclure :
Un film qui apporte vraiment quelque chose au genre "super-héros", avec un vrai discours et un vrai détournement des codes/clichés/archétypes du genre : "Super" de James Gunn. L'aspect méta fonctionne d'autant mieux qu'il ne s'agit ni d'une adaptation d'un comics ni d'une franchise super-héroïque pré-existante.
Pour de la baston qui envoie, revoir ces séquences pour comprendre le sens des mots "mise-en-scène", "rythme" et "montage" :
Old Boy : http://www.youtube.com/watch?v=IspheJGJiYI
Invasion Los Angeles : http://www.youtube.com/watch?v=4-MVMbm6c0k
Pour de l'humour scato/graveleux qui soit drôle, revoir ces productions Apatow :
"SuperGrave", Michael Cera est l'acteur le plus drôle du moment (allez-y, les haters, hatez).
"40 ans, toujours puceau", Steve Carell est l'acteur le plus drôle de la génération précédente.
"Délire Express", Seth Rogen est le deuxième acteur le plus drôle du moment.
Pour une adaptation de comics réussie et inventive : "Scott Pilgrim" d'Edgar Wright.