Je connaissais déjà et méprisais Kill Bill, mais je me suis regardé trois Tarantino d'affilée en une nuit : Reservoir dogs, Kill Bill et Kill Bill2. J'ai bien apprécié Reservoir dogs, mais j'ai haï les deux Kill Bill dans l'ensemble.

Il s'agit ici d'en rendre compte.

J'ai fait une critique de Reservoir dogs, si elle n'est pas très lisible c'est parce que je l'ai écrite sur mon portable avec le poids supplémentaire de cet appareil imbécile qui essaie de deviner les mots à l'avance et qui n'est clairement pas au point. Puis, il y a un gros défaut des mots qui sont doublés, changés de place. Je laisse ma critique telle quelle, parce que je ne vais pas complaire aux gens en corrigeant les problèmes de la technologie quand elle est aussi minable.

Passons à Kill Bill.

En gros, vous allez vous dire que vous retrouvez du Tarantino avec une réalisation esthétisée, de l'érudition du côté du cinéma et de la culture populaire, de l'humour, des jeux d'acteurs, de la musique décalée mais bonne, des dialogues soignés, une narration qui se permet des flashbacks.

Bon, heu ? ça va coincer en réalité.

Pour la musique, il n'y a plus du tout la pertinence de Reservoir dogs. Elle n'est clairement pas justifiée, il y a aussi des sonorités particulièrement hideuses, et on sent le côté exagéré du plaisir assumé de choisir des morceaux décalés de certains Scorsese (Affranchis, Casino). La musique est bien dans Reservoir dogs, mais certainement pas dans les deux Kill Bill, ce n'est pas du tout au point, et bon il y a une justification pour Bang Bang de Nancy Sinatra, mais bon ça ne fait pas pour autant un coup de génie au cinéma. C'est sûr que sur les deux films j'aime bien les morceaux, je kiffe de les entendre si on veut, mais bon au plan de la réalisation du film je ne suis pas convaincu par leurs incrustations.

Les flashbacks coupent évidemment la narration chronologique, mais bon on sait ce que c'est un flashback. J'en critiquerai un minable dans le second volume de Kill Bill qui aura son article à part, mais bon la narration du premier volume il n'y a rien de fou. On a un balayage, le début, le drame vécu par l'héroïne, puis une action de vengeance quatre ans après, puis on a le récit de qu'il y a entre. C'est du déjà-vu, ce n'est pas ouf. Surtout, que la scène de vengeance est mal raccordé à la fin du film avec l'héroïne en avion, d'autant que le film est divisé en deux parties. C'est débile. Ce découpage peut être naturel à la télé, mais dans un projet ambitieux comme un film, ou plutôt comme deux films, c'est merdique. Le film est proposé au cinéma, il sort un an au moins avant la suite. Il faut au moins qu'il ait une unité. Là, ce que j'ai vu manquait clairement d'unité, on voit bien que c'est la première partie. Autant faire un film de 3h30 directement avec toute l'histoire... C'est mou et paresseux tout ça !

Il y a bien sûr une symétrie entre la scène de vengeance et la fin du second film, à cause de la fille de quatre ans, mais bon même cette symétrie-là n'est pas vraiment exploitée.

Parlons-en de la première scène de vengeance. Donc, après une scène énigmatique bien faite où un méchant croit avoir tué l'héroïne, méchant en voix off seule l'héroïne apparaissant en gros plan, on a une scène où l'héroïne débarque chez une femme dans un quartier résidentiel chic, il y a des jouets pour enfant que la caméra met en scène par un plan où ils sont devant la maison cible derrière. Uma Thurma sonne et quand l'autre ouvre elles se reconnaissent et se battent, on nous a fait savoir qu'une enfant allait arriver : les jouets, la mère qui croyait que son enfant arrivait. La fille arrive avec le bus scolaire.

Là, normalement, le bon cinéaste, il fait que la détermination de la vengeance doit amener l'héroïne à s'en servir. On doit avoir une scène choquante où la mère meurt car obligée de se préoccuper de sa fille ou on doit avoir le meurtre de la fille de quatre ans, sa prise en otage. C'était ça que j'attendais. Pensez-vous ? On a une scène ridicule où les deux femmes cachent leurs couteaux dans le dos et font les gentilles devant la fille qui ne dit rien, mais fait comprendre qu'elle n'est pas dupe. C'est nul, ça m'a sorti une première fois du film. L'héroïne fait mine qu'elle ne veut pas choquer une enfant de quatre ans. On me dira que ça a du sens par rapport à la fin du second volume où on apprend tout sur ce qui a poussé l'héroïne à fuir Bill alors qu'elle l'aimait et était une assassine dans l'âme, mais c'est débile, ça reste pyschologiquement indéfendable, ça reste une scène à la con qui te sort du dramatique. Et il faut ajouter qu'il y a une symétrie débile entre cette fille noire, la femme un peu japonaise qui a vu sa famille se faire tuer à quatre ans et bien sûr la fin du film 2. Mais, il ne suffit pas de constater ces symétries pour trouver du propos au film et en défendre la cohérence. Non, la scène d'ouverture par une vengeance est ratée de chez raté.

Et dans cet échec, il y a un des grands défauts du film, c'est qu'on ne vit pas la psychologie des personnages, elle n'est pas incarnée dans le film. Les personnages sont caricaturaux, sont sans épaisseur. Ils n'ont à aucun moment un dilemme intérieur. On ne vit que le drame des actions extérieures : elle risque sa vie au combat, elle va faire ça ou pas à telle personne, elle sait faire ça ou pas, mais on n'a pas une action qui confronte la psychologie du personnage à la réalité. On n'a pas les drames de la conscience. Tout est déjà joué sur du papier à musique. On est loin de la réussite de Reservoir dogs évidemment où les personnages sont pas forcément complexes, mais où il y a tout de même une intériorisation crédible. Kill Bill, il n'y a que de la surface. Et c'est mauvais.

Finissons-en avec la scène de vengeance. La mère veut préparer les céréales de sa fille et en réalité elle brandit une arme cachée, sauf qu'experte en arts martiaux et maniement des armes blanches elle n'est pas foutue d'ajuster un tir à bout portant dans une pièce. L'héroïne s'en sort par chance, puisque son adversaire tire n'importe comment. Elle abat sa cible et échoue à ce que la fille de quatre ans n'ait pas assisté à ça, mais ça ne lui fait ni chaud ni froid finalement. Elle fait sa petite réplique et s'en va.

C'est nul, à nouveau j'étais sorti du film.

Alors, je ne vais pas tout vous raconter. Bon, on a un flashback, et là on part sur le récit rétrospectif qui conduit de la scène du meurtre raté à cette scène de vengeance. Sur sa liste, Uma Thurma a cinq noms, on vient de voir le meurtre de la deuxième de la liste, le film va raconter comment Uma Thurma a survécu à son assassinat puis comment elle a éliminé la première de la liste. Le premier volume n'a pas une matière plus structurée que ça pour avoir sa propre unité !!!

En clair, il faut voir les deux films pour en juger. Les films n'arrivent pas à exister un tant soit peu l'un sans l'autre.

Donc, l'héroïne a survécu de manière invraisemblable aux coups et surtout à une balle dans la tête, sur le côté de la tête pour être précis. On verra vite fait qu'elle a une plaque métallique. Elle va passer quatre ans dans le coma.

On a droit à une justification scénaristique foireuse sur la négligence des méchants. Ils savent qu'elle est en vie, une veut la tuer dans son coma, mais le boss l'en empêche parce que ce serait se rabaisser, ils vont attendre qu'elle se requinque pour alors la faire souffrir encore plus.

Et la fin de justification, c'est qu'elle va s'enfuir de l'hôpital, donc ils ne pourront pas la cueillir à sa sortie, elle disparaît dans la nature.

Toutefois, sans parler des petites péripéties horribles annexes de l'hôpital non reliées à l'histoire principale, quand elle s'enfuit, l'héroïne le fait à deux à l'heure, elle doit réapprendre rapidement à bouger son corps. D'ailleurs, vu qu'elle a laissé des cadavres à l'hôpital, on se demande comment elle reste aussi longtemps immobile dans le véhicule d'une de ses victimes sans se faire attraper par la police et cela dans le parking de l'hôpital, m'enfin bon, passons. Au moins, pour l'instant, le film redevient prenant, intéressant. Il reprend un peu la main.

La suite du film me fait un peu penser au film Les Aventuriers de l'arche perdue. L'héroïne doit se déplacer en avion à différents points du monde pour exécuter sa vengeance, elle doit aller en avion sur l'archipel d'Okinawa ("Island of Okinawa" dans le film ???) pour obtenir une arme digne de sa vengeance contre Bill, puis elle se rend au Japon pour essayer cet arme prévue pour Bill sur une cheffe des gangs criminels organisés du Japon qui manie super bien le sabre.

Faut avouer que tout est con.

Le gars qui fabrique les sabres a promis de ne plus en construite il y a un quart de siècle déjà car ça sert à tuer, mais si c'est pour se venger de Bill qu'il connaît il y consent. Mouais bof ! Et quand on sait que l'héroïne initialement était elle-même une méchante sans état d'âme, ça mérite encore plus mon dédain.

Bon, les scènes à Okinawa on s'en fout un peu. Il y a un travail sur les dialogues étranges qui vaut ce qu'il vaut. Passons.

L'essentiel du film se déroule donc au Japon (oui à Tokyo, j'ai tendance à opposer le vrai archipel du Japon et celui d'Okinawa qui n'est japonais que depuis quelques siècles à peine, d'ailleurs un fabricant de sabres à Okinawa c'est pas très solide au plan historique).

Cheffe des gangs de Tokyo, la cible de notre femme vengeresse déterminée est hissée au rang d'un premier Bill féminin en quelque sorte, façon minimale d'assurer sa force au premier film.

Uma Thurma va dessouder quantité de sbires, avec tous les étages de la hiérarchie criminelle qui y passent : la multitude de randoms et méchants lambdas, la garde rapprochée, les proches de la cheffe aux talents particuliers, et puis le boss de fin comme dans un jeu.

L'héroïne s'habille en Bruce Lee et apparaît comme une américaine blonde qui est formée aux arts martiaux asiatiques : sabre japonais ou combat à mains nues. Les combats sont désastreux malheureusement, ils sont gâchés par des gags, une surenchère d'effets mal venus très kitschs (les vols planés, les coups réussis donnés dans la confusion, etc., etc.). C'est imbuvable. Le jeu de l'actrice n'est même pas ce qui m'a choqué, elle s'en sort bien pour une fausse pratiquante des arts martiaux. Ce qui est épouvantable, c'est la chorégraphie des combats, c'est le mauvais enchaînement forcé des scènes d'action où tout s'aggrave. C'est mal fait, sans aucune crédibilité, sans charme. Je ne comprends pas comment on peut aimer ça.

C'est nul. L'héroïne affronte plus d'une centaine de personnes en même temps à elle toute seule, à l'épée. Les gars ils sont éparpillés, ils attendent leur tour sur le côté, ils n'exploitent aucune faille, alors que l'héroïne montre le dos, a de temps en temps son arme coincée dans un corps, etc. C'est aussi mauvais que les films d'arts martiaux de série B produits à la tonne dans les années 70 et 80. C'est même plus mauvais car les chorégraphies sont plus limitées. Car au moins quand c'était absurde on avait au moins un jeu esthétique d'acteurs connaissant les arts martiaux. Ici, c'est nul, et le second degré est assumé, mais parfois le second degré assumé ça craint, ça fait gars qui sait pas faire et qui dit "tant pis !"

L'héroïne est loin de tout maîtriser à la situation, elle pourrait facilement être tuée en un contre un par un sbire, notamment avec la boule d'acier au bout d'une chaîne, sans oublier le combat à un contre plus de cent. Bref, notre héroïne n'a aucun plan et c'est un peu gênant. Elle exécute une vengeance en se jetant sans réfléchir dans la gueule du loup, sans anticiper les risques, elle pourra mourir et rater sa vengeance bêtement, donnant au contraire l'occasion à l'ennemi de savourer son élimination.

Elle réussit ses coups par chance. C'est un peu con à suivre comme récit !

L'ennemie finale est vaincu dans la neige, alors qu'il n'y en avait pas avant sur la route. On a une allusion limpide au manga Lady Snowblood comme source d'inspiration. Mais passé le plaisir du décor et de l'allusion, le combat n'a rien à offrir. Il n'y a aucune chorégraphie. L'héroïne prend un coup, a le dessous, puis elle prend le dessus donne un coup, on a des répliques qui ont plus de force. La cheffe s'excuse de l'avoir méprisée et l'héroïne accepte les excuses, sauf que là on se dit que le cinéaste est bon et que ça doit faire monter la puissance épique. L'intérêt de faire ces répliques, c'est de dire que le combat sérieux commence après de telles excuses. Ben non, c'est plié ensuite en deux secondes, sans valorisation au combat de l'un ou l'autre personnage.

C'est nul de faire ça, mais c'est nul. Il fallait une scène épique pour soutenir la montée que venait d'assurer les répliques. C'est la base.

Puis, après l'exécution de la méchante, ça se termine par une annonce de la suite et par un plan machiavélique de l'héroïne qui fait que Bill soit informé. La démesure de ce qui s'est passé à Tokyo doit annoncer à Bill qu'il doit s'attendre au même déchaînement, ce qui ne sera pas le cas ce qui fait que là encore c'est une fin de film gâchis.

Je n'ai pas parlé du flashback autour de l'enfance de la cheffe de gang au Japon, c'est un long passage de dessin animé dans le style très artiste du genre de l'animé Ping Pong. Là encore, je déplore certains choix. La fille est sous le lit pendant qu'on exécute ses parents, un cliché vu et revu. Son père tombe mort sous ses yeux avec la lame du sabre qui reste planté elle voit tout. La mère est jetée sur le lit, mais aucune suggestion sexuelle atroce, alors que la fille est sous le lit. Tarantino préfère l'idée qu'elle soit tuée d'un coup de sabre qui traverse le lit et passe à côté du regard de la jeune fille avec une pluie de gouttes de sang que le réalisateur a dû croire une belle idée symbolique simple et efficace.

C'est nul.

Puis, toujours en mode dessin animé, elle grandit dans la vengeance, laquelle est tôt exécutée et devient une criminelle. On a de nouveau une scène où elle est sous un lit, mais en tueuse. Elle tue le yakuza aussi en le transperçant au sabre sur un lit. Taranbtino espère obtenir des bons points parce qu'il appuie ces échos symétriques !???

C'est pas terrible.

Kill Bill ce n'est pas une tuerie, c'est une chierie !

Le début de kill Bill 2 aura une scène pas mal du tout, mais on va retrouver plein de défauts pour le reste, et puis il y a aussi un manque d'unité entre les deux films. Les ambiances ne s'harmonisent pas entre les deux films. Les registres sont mal coordonnés d'un film à l'autre.

Alors, oui, il y a de l'esthétisme, on a des scènes derrière des paravents bleus avec les acteurs en ombres, etc. Mais bon, ce n'est pas du génie. Non ! On ne peut pas regarder les scènes et se dire régulièrement "ah ça s'est bien vu de la part de Tarantino !"

Non, mille fois non !

Après, l'actrice joue pas mal. Je ne la trouve pas aussi jolie que le film passe du temps à le dire, mais le jeu est bon, il y a quelques visages marquants en gros plan, avec le soin sur les cheveux, les regards. Puis, il y a une scène qui m'a fait rire, même si Tarantino n'y est pour rien, c'est quand pour s'évader de l'hôpital Uma Thurma se déguise en Polnareff, blonde à lunettes noires.

davidson
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le 2 juil. 2025

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davidson

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