Killing
6.7
Killing

Film de Shinya Tsukamoto (2018)

"The Killing" de Shinya Tsukamoto. Magnifique film vu lors de l'Étrange festival grâce à la gentillesse de Eric Dinkian. Le dernier film de cet artiste assez peu prolifique mais toujours intéressant (de ce que j'ai vu) est une œuvre qui tourne autour de la violence, ou plutôt ET de son refus. Quand on repense à la profusion picturale de ses premiers films, on peut se trouver surpris face à cet objet quasiment dénué de l'excessivité que j'avais (en partie, évidemment) retenue de lui.


"The Killing" n'est pas un film pauvre picturalement, mais rêche. C'est un film quasi-exclusivement sensitif. Autant dire qu'on est loin des standards actuels, où la profusion de blabla dramatique (qui induit le drame par la conversation, autant dire le niveau 0 du drame au cinéma) prend le pas sur la grammaire de l'image. C'est un film avec un travail sur le son que je trouve pour ma part tout à fait exceptionnel car, même si on voit que c'est une œuvre de peu de sous, l'ensemble est d'une force viscérale et, si j'étais un journaliste sans talent (je ne suis pas l'un et sûrement l'autre), je dirais crépusculaire. Noire. Choquante. Triste.


Ce n'est pas un film sur le pacifisme (le refus clair et net de la violence plus une moralisation gerbante dès lors que le sujet est abordé et porté aux nus). C'est un film sur le refus, l'idéalisme du refus, et tout ce que cela peut avoir comme conséquences, qu'elles soient morales, psychologiques, physiques ou sociales. Car refuser la violence n'est jamais l'éliminer. S'empêtrer dans ce refus là, dans cette sorte d'idéalisme peut conduire à la naïveté voire à la bêtise. La recueillir peut amener à la gratuité, à l'absence de sens dans cette violence. En réfléchissant dessus, j'ai pensé au livre de Melville : "Bartleby".


"Je préfèrerais ne pas". Certes, ne peut pas. Fuir, mais combattre. Se voiler la face, tout en ayant conscience. Laisser faire faire, tout en agissant. Ne pas vouloir, mais être poussé à. Abandonner, tout en combattant. Un bon sabre effilé à la main. Vomir l'inéluctable. Ne pas pouvoir tout en éviscérant. Pleurer de rire. Et rire nerveusement. Râles et soupirs.


Un film absolument superbe, qui prend, pour ainsi dire, aux tripes, d'une force rare pour le peu de moyens. Du cinéma comme je l'aime, de celui qui combat, qui n'a pas de message si ce n'est celui de se poser des questions.

batche
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le 10 mai 2019

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