‘Kompromat’ est un film efficace mais superficiel, qui divertit plus qu’il n’émeut ou instruit. Le film souffre selon moi de faiblesses scénaristiques majeurs qui auraient pu être évitées. Le film n’en reste pas moins plaisant.
En 2017, Mathieu Roussel est un expat français travaillant en tant que directeur de l'Alliance française à Irkoutsk en Sibérie. Un jour, il est soudainement et violemment arrêté par les autorités. Incarcéré, il découvre qu'il est victime d'un Kompromat, une méthode habituellement employée par les services de sécurité russes pour nuire à des opposants en créant notamment de faux documents compromettants. Son avocat obtient sa mise en liberté provisoire sous bracelet électronique. Il ne lui reste alors qu'une solution : l'évasion.
On peut dire que le film arrive à point nommé. Le film montre les méthodes du FSB pour compromettre un homme, le faire tomber et faire le nécessaire pour donner l’impression que procédures judiciaires et policières sont réglementaires et justifiées. La guerre en Ukraine met en lumière certains actes de la police russe, des agents russes : les arrestations d’opposants, les morts mystérieuses d’oligarque. Le film de Salle est intéressant en ce sens. Il montre que le FSB n’est pas si éloigné du KGB. On peut même dire qu’il a hérité des mentalités et des méthodes des services secrets soviétiques : mises sur écoute, filatures, tortures, témoignages obtenus par la contrainte et procédures falsifiées.
La qualité du film est d’avoir su s’inscrire dans un contexte géopolitique. On est en 2014, la Russie a envahie la Crimée. Les relations diplomatiques se corsent. Le film montre relativement bien la vie d’un ambassade sans toutefois rentrer vraiment en profondeur. Ces lieux sont montrés comme un mélange de représentation officielle et d’actions plus sous-terraines. Deux aspects qui entrent parfois en contradiction. L’ambassade doit-il sauver Matthieu Roussel qui s’y est réfugié car recherché aux dépens des relations diplomatiques ? Il faut dire que Louis-Do de Lencquesaing joue l’ambassadeur avec un ton ultra mielleux rendant le personnage assez trouble, pour ne pas dire antipathique.
Mais hélas, le film souffre d’un scénario qui selon moi a été mal pensé. Pourquoi avoir accordé autant d’importance à la fuite au détriment de la procédure ? Il me semble que l’acharnement du FSB, les procédures, le travail diplomatique était amplement plus intéressant que l’aspect ‘survival’ qui est plus convenu, et déjà-vu mille fois. On reste en surface des choses. Comment se montent ces machinations, ces Kompromats ? Les interrogatoires et le travail de l’ambassade sont traités un peu rapidement. Dommage. La fuite du personnage, qui redisons-le prend trop de place dans le film, n’est pas ratée et est assez plaisante. Mais c’est tout.
Une chose m’a tout de même paru assez insensée. On ne sait pas du tout pour quoi le FSB s’acharne contre lui. Penserait-il que Roussel est un espion ? Deux pistes sont données sans vraiment être confirmées : ivre, Roussel drague une jeune Russe sous les yeux de son beau-père, qui comme par hasard travaille pour le FSB. Le personnage dit par la suite que le FSB s’acharne contre lui car il représente tout ce que les Russes détestent. Mais on peine quand même à comprendre pourquoi le FSB s’acharnerait pour ces deux raisons là. Elles paraissent un peu faible. De même, on ne comprend pas du tout ce qui pousse la jeune fille à aider le personnage à ses risques et périls. On ne comprend pas ses motivations. Certains me diront qu’il s’agit de garder une part de mystère. Personnellement, je trouve qu’il s’agit d’une vrai faiblesse qui rend l’ensemble de l’histoire peu crédible.
Le film manque de sérieux, de fond pour tout à fait convaincre. Produit par M6, on sent un peu qu’il a été programmé pour faire de l’audimat. Dommage, car le sujet est passionnant mais est ici mal traité.