Ah bon, l'amour était en question dans le film !

Dernière réalisation de Cayatte au cinéma en 1978. Ensuite, il travaillera encore quelques années pour la télévision.


Plusieurs sujets dans ce film qu'on ne voit d'ailleurs pas venir immédiatement. Ce n'est que dans la deuxième partie du film, la plus intéressante, que Cayatte dévoile ses batteries et nous explique où il veut en venir. On ne peut d'ailleurs pas vraiment le lui reprocher puisqu'il faut bien qu'il explique les bases de son cas d'école au spectateur avant d'entrer dans le vif du sujet.


A la base, le cas d'école part du meurtre d'un homme pour lequel les soupçons se portent rapidement sur l'épouse et son amant qui se trouve être un sujet britannique. Les premiers pas de l'enquête montrent que les deux mentent à plusieurs reprises et pire, tentent de s'enfuir à l'étranger.


Tentons d'en tirer les points positifs du film.
J'ai dit que l'amant était britannique. Devant l'absence manifeste de preuves objectives, le gaillard réussit à filer à "l'anglaise" pour rejoindre son pays et s'y faire juger et acquitter. Ce qui donne l'occasion à Cayatte de mettre ainsi en évidence quelques écarts sur les façons de faire dans les deux pays dont en particulier la présence en France, du juge dans la salle de délibération des jurés. Mais ceci me semble relever de la manipulation car le spectateur n'a pas tous les éléments pour apprécier cet écart. Et je suis bien certain qu'on pourrait aussi trouver des contre arguments chez nos voisins d'outre-manche.

L'autre point positif, c'est le poids des médias qui peut influencer l'enquête d'une part, l'instruction d'autre part et au final les jurés. Le sujet est effectivement intéressant surtout lorsque s'introduit dans le débat les ressentis franco-anglais où la presse anglaise va plutôt soutenir son compatriote et la presse française le contraire. Surtout quand le procureur craint comme la peste ce type de débat "Quand on a un Anglais dans l’affaire, ça devient Jeanne d’Arc ou Waterloo"


Les points négatifs du films sont multiples ;
D'abord Cayatte veut démontrer que tout ça se terminera pas deux erreurs judiciaires et fera dire à la juge d'instruction : "deux erreurs judiciaires dans une même affaire, c'est quand même un record".
Le problème auquel arrive le spectateur lambda c'est qu'on n'en sait rien et que parler d'erreur judiciaire c'est aller un peu vite en besogne. Le fait d'être infoutu de démontrer une culpabilité peut conduire à un non-lieu sans pour autant démontrer l'innocence. Et ce n'est pas le peu d'éléments fournis par les rares flash-back qui peuvent permettre de se forger une opinion. Car c'est bien dans cette direction que Cayatte cherche à embarquer le spectateur et les deux coups de théâtre (dont la ridicule attaque du fourgon cellulaire) de la deuxième partie ne changent pas grand chose au débat.


D'un point de vue casting, le rôle de la juge d'instruction est interprétée par une opiniâtre mais humaine Annie Girardot. Comme toujours, Annie Girardot endosse parfaitement le rôle et joue en finesse le personnage qui rassemble et accumule pas à pas les preuves ou les éléments laissant soupçonner une culpabilité de l'épouse et/ou de son amant. C'est encore une fois une actrice convaincante et remarquable.
Le procureur est interprété par Michel Galabru dans le rôle de quelqu'un qui se soucie de la vérité mais en même temps s'inquiète des retombées politiques d'une affaire qu'il sent comme pourrie (les relations franco-britanniques et le poids des médias susceptibles d'enflammer une opinion publique). Il est assez crédible dans son rôle. Le "assez" est plutôt relatif au scénario pas très convaincant qui rejaillit sur son jeu.
Michel Auclair qu'on voit peu (c'est le mari qui se fait flinguer au début et qu'on revoit lors des flash-backs), Dominique Paturel, Jacques Morel dans le rôle du Juge de la Cour d'Assise font le job.
Reste Bibi Anderson dans le rôle de l'épouse qui n'est pas très convaincante et qui ne provoque guère d'empathie de la part du spectateur ; de plus, l'attitude de l'actrice face à la juge d'instruction (Annie Girardot) n'est pas crédible du tout.


En conclusion, Cayatte, fidèle à lui-même, a monté un cas d'école pour dénoncer quelques dysfonctionnements de la justice en France ; le sujet m'a paru assez tiré par les cheveux ; les conclusions qu'il tente de faire partager au spectateur ne sont pas convaincantes car finalement basé sur un scénario peut-être pas assez élaboré.
Je vais mettre 3 comme note + 1 pour la belle prestation d'Annie Girardot qui sauve les meubles par son charisme et sa personnalité.

JeanG55
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le 13 mars 2022

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