Non sans être avertie que ce qui m’attend ce soir est une expérience d’un autre ordre que ce qui est connu lorsqu’on pénètre dans une salle obscure, je m’aventure dans ce petit cinéma de ce beau quartier parisien, pleine d’une curiosité avide de vivre quelque chose d’inédit… La salle est comble.
aurélien real termine son introduction en nous suggérant de tenter de rester au moins 1h15 dans la salle, le film durant 2h30. Ce qui nous attend va donc être si éprouvant ???


2h30 plus tard, la salle se rallume, de longs applaudissements… un coup d’œil autour de moi pour vérifier que… oui, tout le monde est toujours bien là, pas de siège vide… Je les avais presque oublié tous ces spectateurs autour de moi tant le silence de la salle et l’absorption dans la bulle créée par l’univers de cette œuvre d’orfèvrerie cinématographique entrant en résonance profonde avec mon univers intérieur furent intense…


J’émerge… c’est comme un retour d’une expédition périlleuse où j’aurais été prise dans une avalanche… Avalanche d’impressions, d’expériences sensorielles… une confrontation en pleine face avec les thématiques et les problématiques essentielles…


Je m’attendais à être désorientée par le non-conformisme, par la non-application de toute règle et méthode de construction narrative, mais, ce qui surgit là, c’est que c’est la linéarité et la construction conventionnelle d’un récit, qui finalement apparaissent décalées et inaptes à traduire l’expérience humaine… On s’est tellement accoutumé au fait qu’il y ait une seule couche linéaire qui nous absorbe dans l’identification, et qui nous rend aveugle à une vision plus globale… Apparaissent l’inconséquence des histoires qu’on nous raconte, leur artificialité, leur inaptitude à ouvrir à cette vision large…
Ce qu’aurélien real nous fait goûter par une construction hyper élaborée en multi-couches est comme une remise en phase avec notre expérience d’être humain, il nous transporte hors de la bulle anesthésiante dans laquelle les histoires nous emprisonnent.


Dès le premier plan je comprends que je vais être amenée à être active pendant ces 2h30. Ca ne va pas être de la distraction, ça va venir me chercher, me provoquer, me déranger, me questionner… Audacieux de commencer un film par un long plan séquence flou, caméra à l’épaule. Ce plan vertigineux tourne autour du personnage de l’écrivain… D’emblée ça nous plonge dans le trouble de cet homme au prise avec son acte créatif.
Tout au long du film, le point de vue du réalisateur en voix off, et, par petites touches des images du plateau et de l’équipe de tournage vont venir superposer un niveau de lecture au questionnement sur l’acte de création.


Il y aurait tant à en dire… Mais pour ne pas en parler trop inconsidérément il faudrait la revoir cette œuvre cinématographique… Et plus d’une fois…


Mais en quelques phrases je rends hommage:


aux comédiens surprenants de sincérité et de don d’eux-mêmes.


au travail de l’image d’une grande beauté, jamais dans l’effet gratuit, qui vient réveiller des finesses de perception…


à la bande sonore d’une richesse exceptionnelle qui nous transporte dans des paroxysmes de vécu sensoriel sans nous laisser aucun répit, les ambiances, les bruitages qui se moquent du réalisme y participant grandement… et puis, qui d’un seul coup ose le silence total…
Du chaos d’être au monde à la grande paix contemplative…


Et finalement, au moment de partage que nous ont offert après la projection le réalisateur et l’équipe et qui m’a laissé un goût savoureux et délicat de ce qui peut s’échanger quand une œuvre d’art vient toucher au profond, au sensible, à l’intelligence…

mrlnlfr
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le 30 avr. 2017

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