Je tiens Mia Hansen-Love comme l’une des cinéastes les plus passionnantes d’aujourd’hui, espérant une merveille à chaque nouvelle sortie. Eden, son précédent film, est à ce jour et à mes yeux son seul film raté encore que je le trouve intéressant à bien des égards. Si L’avenir semble s’inspirer de la vie des parents de la réalisatrice (tous deux professeurs de philosophie) autant qu’Eden racontait beaucoup de celle de son frangin, la réalisatrice renoue avec l’inspiration et la grâce qu’on trouvait dans Le père de mes enfants, Tout est pardonné, Un amour de jeunesse. Trois films magnifiques que j’ai eu le plaisir de voir (au ciné) et de revoir ensuite, sans jamais les déconsidérer bien au contraire. L’avenir c’est celui de Nathalie (campée prodigieusement par la non moins prodigieuse Isabelle Huppert) professeur de philosophie au lycée, qui se situe dans un moment étrange de sa vie, un carrefour, où tout va se chambouler. Ses enfants ne sont plus à la maison, sa mère devient sénile et les différends avec sa maison d’édition se répètent. Et bientôt, son mari va la quitter, elle va perdre sa mère, être grand-mère et nouer des liens avec un garçon qui fut son étudiant quelques temps auparavant. C’est tout refaire, repartir de rien. La portée symbolique pourrait être lourde mais ce qui caractérise cette fine écriture, sa progression elliptique et sa narration inattendue qui fait qu’il est impossible d’anticiper chaque aiguillage, permet au film d’atteindre une légèreté qu’on ne voit nulle part dans le cinéma français. C’est un film apaisant, riche mais délicat, autant qu’il brosse le portrait et le monde de cette femme avec soin. Nathalie est dans chaque plan ou presque. On voyage à ses côtés entre Paris, La Bretagne et le Vercors, la gare de Clelles-Mens et le Parc des Buttes-Chaumont. On y parle de littérature et de philo en permanence sans que cela n’écrase le film pour autant. Toutes les interactions sont des émerveillements : Nathalie et Heinz, avant et après leur séparation ; Nathalie et ses enfants ; Nathalie et Fabien ; Nathalie et ses élèves ; Nathalie et sa mère ; Nathalie et son petit-fils. A ce titre, ce dernier plan est probablement l’un des plus beaux et bouleversants que l’on verra cette année. Je ne doutais pas de voir Mia Hansen-Løve revenir à ce niveau d’inspiration, simplement je craignais un peu la collaboration avec Huppert. J’ai beaucoup entendu ici et là que la réalisatrice avait trouvé son identité grâce à l’actrice, je pense au contraire qu’elles se sont bien trouvées toutes les deux, ensemble. Huppert lui aura permis de rebondir. Et Hansen-løve aura offert à Huppert son plus beau rôle depuis longtemps. Grand film.

JanosValuska
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le 6 juin 2016

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