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Richard Matheson a lui-même adapté pour l'écran son roman, devenu, comme le film, un classique de la S.F.. Il a dû pas mal émonder pour en faire une œuvre grand public, le livre étant évidemment davantage détaillé et complexe, d'autant plus que certains éléments n'auraient jamais passé le cap de la censure cinématographique de l'époque, notamment sa dimension sexuelle (ainsi, Scott est finalement si frustré qu'il fantasme comme un fou sur la baby-sitter de sa fille, une ado boutonneuse très banale).

Matheson a ainsi accompli un remarquable travail d'épure, ne gardant que l'essentiel. Exit la fille des Carey, peu de personnages, pas de digressions, un récit ramassé en 1h19, tout étant axé sur l'irréversible mutation de Scott, avec une tension constante et croissante. Archétype du bel Américain auquel il est aisé de s'identifier, Grant Williams (dont ce fut le seul rôle marquant) incarne parfaitement un personnage qui, comme souvent chez Matheson, est un homme ordinaire confronté à un situation extraordinaire, et qui fait ce qu'il peut; sa transformation, déjà problématique, génère d'autres problèmes: son couple se délite, il perd son emploi, ce qui était particulièrement humiliant à une époque où l'on jugeait que c'était à l'homme de ramener de l'argent à la maison. Il ne peut rien contre la fatalité qui ne le lâche pas, seulement trouver brièvement du réconfort auprès de la naine Clarisse, qui, elle, a toujours vécu parmi les géants.

Mais Scott va en arriver à régresser au niveau de la survie, lorsqu'il se retrouvera menacé par un chat (présent dès la 2ème scène du film, comme un sinistre avertissement), puis par une araignée. La 2ème partie du film est évidemment la plus connue et la plus palpitante, Scott, désormais prisonnier de la cave, devant se constituer un univers à sa mesure et échapper à un prédateur qu'il aurait jadis pu écraser sans mal sous son pied ! Presque 70 ans après sa sortie, les trucages de "L'Homme qui rétrécit" restent crédibles et les décors surdimensionnés épatants, bien utilisés par un Jack Arnold dont la réalisation ne souffre aucune faiblesse. Après les différentes luttes que Scott a menées et souvent gagnées, la dimension philosophique réapparaît dans le célèbre dénouement du film (où la référence à Dieu est, à l'époque, inévitable), qui voit le héros connaître non pas la résignation, mais l'acceptation de sa situation: même minuscule, il existe toujours, il est toujours capable de réflexion et d'action.

Drustan
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le 8 nov. 2025

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