Regarder un film de Wes Anderson est, pour ceux qui ont eu l'occasion de s'y essayer, l'assurance de plonger dans une imagerie bien particulière et une mise en scène aussi maniérée qu'élégante. L'Ile aux Chiens ne dérogera pas à la règle : le 9e essai du réalisateur est un film virtuose où le post-apocalyptique rencontre la dystopie. Dans un Japon rétro-futuriste, un maire aux tendances dictatoriales décide d'exiler les chiens, officiellement pour des raisons sanitaires, dans une déchetterie publique. La véritable raison est surtout qu'il en historiquement phobique.
Alors qu'il a nourri son cinéma de ses tourments et de mélancolie, Wes Anderson semble davantage se tourner avec ses films d'animations vers des fables aux accents sociaux et politiques bien contemporains : retour de l'autoritarisme, zones de non droit où les populations sont déportées... Le portrait est noir, la violence est bien présente, mais comme toujours avec Wes Anderson compensée par un humour naïf et bienveillant.
Truffée (si l'on ose dire) de références visuelles et d'idées de mise en scène, le film du Texan est également un beau plaidoyer pour l'émancipation de la jeunesse : pour s'engager dans un combat face au cynisme porté en étendard par le maire dictatorial, il faut la bravoure du petit Atari et l'engagement politique d'une jeune lycéenne.
Comme souvent dans la filmographie de Wes Anderson, l'Ile aux Chiens est un film choral singulier, un théâtre de marionnettes élégant porté admirablement par un casting haut de gamme et par, notons-le, la partition inspirée d'Alexandre Desplat.
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