L'Île de Giovanni
7.2
L'Île de Giovanni

Long-métrage d'animation de Mizuho Nishikubo (2014)

Quand le Japon panse ses blessures de l'Histoire...

Le scénario porte sur un épisode méconnu de la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Battu, le Japon voit certaines de ses terres annexées par l’Union Soviétique, et notamment la toute petite île de Shikotan à l’extrême nord de l’archipel. Une cohabitation difficile s’installe, les maisons et les biens des Japonais sont réquisitionnés par les soldats soviétiques et leurs familles. Une certaine forme de résistance s’organise malgré la perspective d’un rapatriement des populations vers le Japon. Et bien sûr, comme toujours, ce sont les enfants qui gèrent la situation avec intelligence. Partage des jeux et des chansons, amitiés… une intégration éphémère avant le transfert en bateau vers des camps de transit, et avant le retour au pays.

Junpei et Kanta sont frères. Leur mère est morte et leur seule famille est constituée de leur père, leur vieux grand-père, et d’un oncle roublard. Le plaisir de Tatsuo, le père, est de chaque soir faire lire à ses enfants un passage de « Train de nuit dans la voie lactée » de Kenji Miyazawa. Dans cette nouvelle, Giovanni et Campanella sont deux amis. Ils ont donné leur nom à Junpei (Giovanni) et Kanta (Campanella). Le thème de cette nouvelle est la mort, la quête du bonheur… et dans ce film, c’est un véritable fil conducteur, avec, sans mauvais jeu de mot, la présence permanente de trains, miniatures ou rêvés par les deux enfants. Un voyage au sens propre comme au figuré, dans le froid, la faim, la peur des arrestations et des camps de travail.

Deux découvertes importantes dans ce film de Mizuho Nishikubo : cette histoire douloureuse aux blessures à peine refermées, et cette célèbre nouvelle de Miyazawa, peu connue en France mais un classique dans les écoles japonaises. C’est un film dans la même veine que « Le tombeau des lucioles », dur et tragique. Il n’est donc pas à recommander aux jeunes enfants. En parlant du Tombeau… je regrette un peu [voir suite sur mon blog car spoilers]...

J’ai eu un peu de mal avec les graphismes au départ. Le trait est raide, sec, mais convient bien au thème et à l’ambiance générale. Evidemment, quelques notes d’humour ici ou là, parce que ce sont des enfants facétieux et rêveurs, mais rien qui ne vienne décrédibiliser le sujet. Un bel équilibre.
Ghislaine_Borie
7
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le 6 mai 2014

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Ghislaine Borie

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