Réalisé par Yoshiyuki Momose et sorti en 2023, L’Imaginaire est le second long métrage du studio Ponoc, fondé par d’anciens collaborateurs du Studio Ghibli (le troisième si on compte le film d'anthologie Héros modestes de 2018). Adapté du roman illustré Amanda et les amis imaginaires d’A. F. Harrold et Emily Gravett, le film transporte le spectateur sur la côte britannique, où Amanda, une fillette rêveuse, partage son quotidien avec Rudger, son ami imaginaire. Lorsqu’un inquiétant chasseur d’Imaginaires, M. Bunting, s’en prend à eux, Rudger se retrouve séparé d’Amanda et plongé dans un monde où les êtres inventés tentent de survivre à l’oubli.
Le film se distingue par une maîtrise narrative et esthétique impressionnante. Sa beauté visuelle saisit dès les premières images : couleurs somptueuses, animation d’une fluidité exemplaire, compositions poétiques qui rappellent les plus grands Ghibli tout en affirmant une identité propre, plus directe et universelle. Le scénario, finement écrit, mêle aventure, émotion et métaphore sur la mémoire, l’enfance et la persistance des liens imaginaires. L’univers déployé, mouvant et organique, agit comme un personnage à part entière, vibrant de vie et de sens. Les personnages sont touchants, sincères et portés par une sensibilité rare, Rudger émeut par sa loyauté, Amanda par sa fragilité. Le film parvient à s’adresser à tous les âges, offrant plusieurs niveaux de lecture sans jamais perdre son cœur : la puissance de l’imaginaire comme refuge et prolongement de l’amour.
La densité du récit, si stimulante, peut parfois se retourner contre lui. Certains passages deviennent plus abstraits à mesure que l’intrigue s’élargit, et les lois internes de ce monde fantastique manquent parfois de clarté. Quelques transitions narratives s’avèrent un peu complexes pour les plus jeunes spectateurs, qui risquent de perdre le fil des enjeux ou de certaines symboliques. Ces petites zones de flou n’entachent pas la qualité générale, mais elles limitent légèrement la lisibilité d’un univers aussi riche.
L’Imaginaire est un film splendide, empreint d’émotion, de grâce et d’intelligence. Yoshiyuki Momose signe une œuvre qui, sans renier l’héritage Ghibli, affirme la légitimité artistique du studio Ponoc. Derrière son apparente douceur, le film propose une réflexion profonde sur la perte, la résilience et la puissance créatrice de l’esprit humain. Rares sont les films capables de concilier autant de beauté visuelle et de profondeur symbolique. Un enchantement total, presque parfait.