Critique initialement publiée sur CloneWeb.net


On a du mal à imaginer Jérôme Salle tourner un drame familiale à la campagne ou une comédie franchouillarde avec des humoristes de télévision. Après deux Largo Winch et le sympathique Zulu, thriller policier tourné en Afrique du Sud et sans doute le meilleur rôle d’Orlando Bloom, il fallait un film d’envergure pour le réalisateur. Et force est de constater que son projet d’un biopic consacré à Jacques-Yves Cousteau était une bonne idée. Le réalisateur est en effet taillé pour l’aventure.


L’explorateur Cousteau est né en 1910. Mais le film commence à la fin des années 40 quand, après avoir modernisé les bouteilles individuelles pour permettre de plonger sans scaphandre, il quitte la marine nationale et décide d’acheter la célèbre Calypso pour aller explorer les mers. Nous allons le suivre à différents moments de sa vie jusqu’à un jour tragique de 1979 où son fils Philippe décède dans un accident d’hydravion.


Le film s’ouvre sur ce drame pour revenir en arrière et nous montrer Philippe tout jeune, avec sa famille et alors que ses parents décident de l’envoyer en pension pour mieux partir explorer les océans. Commence alors un incroyable travail de mise en scène pour reconstituer les époques et les environnements. Jérôme Salle fait voler sa caméra sur et sous l’eau, elle s’élève, plonge, tourne offrant de longues et très belles séquences. Les cadrages sont superbes et la photographie de Matias Boucard à tomber à la renverse. Difficile de faire plus bel écrin pour rendre hommages aux aventures du Commandant et aux images qu’il a ramené à travers ses différents films et séries. Si vous avez des souvenirs d’images vues à la télévision et tournées au plus près des baleines ou sous les glaces de l’Antarctique, vous aurez l’occasion d’y replonger (!).


L’Odyssée n’est pas pour autant un film sans complaisance. Jacques-Yves Cousteau avait, pour financer ses premières expéditions, signé un pacte avec le diable – ou plutôt avec l’Institut du Pétrole, avec pour mission de trouver des sources sous-marines d’oléagineux en vue de forages (et on vous laisse imaginer les dégats que l’installation de plate-formes pétrolières ont pu causer par la suite). Il se souciait, au début de ses voyages, peu de l’environnement et il aura besoin de son fils Philippe pour prendre une conscience écologique – et le spectateur s’en rendra compte à travers une scène de jetage de déchets par dessus bord devant le regard effaré de Pierre Niney.


Au delà du biopic classique, Jérôme Salle va dévoiler en fil rouge une histoire de famille et la relation complexe entre un père et son fils, tous deux passionnés par l’exploration mais avec des idées et une vision opposées. Cette partie de l’histoire, il va la montrer en privilégiant l’image aux dialogues, en racontant avec sa caméra, à travers le jeu de deux acteurs éblouissant (Niney, surtout, mérite le César). Si les séquences sous-marines offrent des cadres de toute beauté, c’est bien dans l’intime, dans la manière de filmer et diriger ses comédiens que Salle montre l’étendue de son talent.


On pourra juste reprocher au film un rythme un peu trop saccadé dans sa dernière partie, avec des scènes manifestement raccourcies pour faire en sorte que le long-métrage fasse juste deux heures. On ne doute d’ailleurs pas que le metteur en scène a encore beaucoup de scènes dans ses placards et on aurait bien pris une demi heure supplémentaires de plans sous l’eau et de scènes tournées (réellement !) au sud du cercle polaire antarctique.


Propulsé par la musique d’un Alexandre Desplat en grande forme, cette Odyssée de Jacques-Yves Cousteau est une franche réussite. Une production française comme on aimerait en voir plus souvent de ce coté de l’Atlantique et à qui on souhaite de repartir avec autant de statuettes compressées et dorées que possible.

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le 10 oct. 2016

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