Il est possible de voir dans le geste d’Aliocha – demander une permission pour aller embrasser sa mère (mais aussi pour lui "réparer son toit", ce qui n’est sans doute pas aussi insignifiant, symboliquement tout au moins, que semble le penser le camarade général) – une allégorie de ce que doivent les jeunes russes, en ces temps de guerre contre l’Allemagne nazie, à leur "mère patrie". Vu sous cet angle, le chemin parcouru par le héros, semé d’embûches mais surtout jalonné de rencontres magnifiques (un soldat amputé qui a peur de retrouver sa femme, une jeune fille dont il tombera amoureux, un père dans l’attente de nouvelles de son fils parti au front, une famille chassée d’Ukraine qui se voit comme "des oiseaux-migrateurs"…), finirait par composer le visage – les visages – d’un pays alors à l’épreuve de l’Histoire, meurtri par l’invasion nazie mais dont le sentiment patriotique s’est trouvé renforcé, exalté même, si l’on s’en remet au lyrisme poétique de ce magnifique mélodrame, dans lequel Grigori Tchoukhraï, le temps d’une permission, magnifie l’âme russe et sa jeunesse sacrifiée.